Lorsqu'on
songe au Mondial mexicain, dans un de ces moments de nostalgie
footballistique que connaissent parfois les enfants de la balle ronde
devenus faussement adultes, on pense immédiatement au sommet de
Guadalajara entre la France et le Brésil, au penalty de Zico arrêté par
Bats et aux cannes de serin d'un Fernandez ivre de joie. Ou encore à la
fameuse main de Maradona, suivie de son non moins fameux slalom dans la
défense anglaise.
Sans
doute moins à un huitième de finale pourtant exceptionnel entre deux
excellentes sélections européennes de l'époque, l'URSS et la Belgique,
disputé à l'Estadio Nou Camp de Leon, là même où l'Angleterre avait
perdu son titre contre la RFA seize ans auparavant. Une affiche moins
glamour que le choc entre les champions d'Europe français et les
artistes brésiliens, mais qui accoucha d'un match de toute beauté.
Deux
grands joueurs se retrouvent face à face ce jour-là: Igor Belanov,
vainqueur de la Coupe des Coupes 1986 avec le Dinamo Kiev et qui
sera sacré Ballon d'Or en fin d'année, et Enzo Scifo, le prodige
d'Anderlecht, considéré à vingt piges comme le meilleur joueur de son
pays et comme un des futurs cadors du football européen. La rencontre
oppose également des deux gardiens les plus doués de leur génération, le
sobrissime Rinat Dassaev et Jean-Marie Pfaff, portier fantasque du
Bayern.
Chez
les Diables Rouges de Guy Thys, neuf membres du onze titulaire évoluent
au pays, Gerets jouant alors au PSV Eindhoven. L'équipe soviétique, qui
a fait souffrir la France en poules, est composée quasi-exclusivement
de joueurs du Dinamo Kiev, à l'exception de Dassaev et Aleinikov, ce qui
facilite grandement les automatismes. C'est en
fait une superbe sélection ukrainienne, entraînée en prime par
Lobanovski, qui défend les couleurs de l'URSS en terre mexicaine.
Par
deux fois, Belanov, l'homme du match, donne l'avantage aux Russes, ou
plus exactement à l'Union Soviétique. D'abord d'une frappe somptueuse
dans la lucarne de Pfaff en première mi-temps, puis d'un joli tir croisé
dans le petit filet en deuxième. Mais par deux fois, les Belges
répliquent. Scifo, oublié au second poteau, prend tout son temps pour
tromper Dassaev à la 56ème, avant que Jan Ceulemans, le buteur du FC
Bruges, n'égalise à nouveau à un quart d'heure de la fin pour donner
trente minutes de plaisir supplémentaires aux spectateurs.
La première-mi
temps des prolongations sera fatale aux Soviétiques, qui encaissent
deux buts en huit minutes signés Demol et Claesen. Sur penalty,
l'inévitable Belanov s'offre un
triplé
et ménage le suspense, mais les Belges s'imposent finalement 4-3 au
terme du match le plus prolifique du Mondial, a égalité avec le 6-1
infligé par les Danois à l'Uruguay en poules.
Au
tour suivant, les partenaires de Vercauteren, auteurs d'un tournoi
remarquable, sortiront l'Espagne aux tirs aux buts avant de s'incliner
devant le génie de Maradona en demie-finale, atteignant le dernier carré
pour la première fois de leur histoire. Il s'agit de la meilleure
équipe belge de tous les temps, avec celle qui disputa la finale du
Championnat d'Europe 1980 contre l'Allemagne. Sept joueurs issus de la
formation soviétique éliminée ce jour-là seront présents deux ans plus
tard sur la pelouse du Stade Olympique de Munich pour la finale de
l'Euro 88, marquée par l'improbable volée d'un certain Marco Van Basten.
La chute du mur, la perestroïka et l'éclatement de l'URSS sonnèrent la
fin de cette période dorée du Dinamo Kiev, dont les joueurs allèrent
exporter leurs talents aux quatre coins de l'Europe.
15 juin 1986, Estadio Leon, Leon: Belgique 4-URSS 3 a.p.
Buts: Belanov (27, 70, 111), Scifo (56), Ceulemans (77), Demol (102), Claesen (110)
Belgique:
Pfaff - Gerets (Van der Elst 112) - Renquin - Grun (Clijsters 99) -
Vercauteren - Scifo - Ceulemans - Claesen - Veyt - Demol - Vervoort
URSS:
Dassaev - Bessonov - Kuznetsov - Rats - Demyanenko - Aleinikov -
Yaremchuk - Yakovenko (Yevtuchenko 79) - Bal - Zavarov (Rodionov 72)
- Belanov


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