Nous avons déjà exprimé sur ce blog toute l'admiration que nous portions à Javier Pastore, joueur génial et anachronique, artiste fragile dans un univers de brutes et de muscles, danseur étoile des stades, talent souvent incompris et en tout cas sous-évalué. Lorsqu'il tient sur ses deux guibolles, l'Argentin fait partie des meilleurs joueurs du monde, quoi qu'en disent spécialisses, essepères et analystes à la mords-moi-le-noeud mais pas trop fort quand même attention. Quand on le regarde évoluer à son meilleur niveau, tout paraît simple, limpide, évident, ce qui est clairement la marque des très grands.
Contrairement à ce que pensent trop de fanatiques de FIFA 17, la vérité footballistique réside dans le dépouillement et la justesse (que l'on songe par exemple à Iniesta, Xavi, Pirlo, Modric ou encore Michael Laudrup pour les plus anciens). On ne juge pas de la qualité d'un joueur au nombre de roulettes qu'il exécute par match, mais sur ce qu'on appelle le QI football ou l'intelligence situationnelle, c'est-à-dire la capacité à prendre la bonne décision au bon moment, à imprimer le bon tempo, mettre l'équipe dans les meilleures dispositions. Sur ce plan, Pastore appartient clairement à l'aristocratie du jeu.
Keep calm and give it to Javier: voilà ce que tout footophile sensé (et accessoirement pro-PSG) demande pendant tout un match. Donnez-lui la chique, au baron de la bière, et tout se passera bien. Nous ne voulons pas dire ici que le jeu du Flaco n'est pas dénué de risques. Au contraire, son style unique implique nécessairement du déchet, puisqu'il cherche toujours la passe qui fait mal, qui casse les lignes, permet un décalage ou une relance propre. Il perdra toujours quelques ballons, ce qui lui vaudra toujours des critiques de la part des gens qui ne comprennent pas grand-chose à ce sport et feraient mieux de mater du biathlon (c'est quoi le concept du biathlon au fait?).
Motta est dans la gestion, Verratti dans la direction des opérations depuis une position reculée, Rabiot et Matuidi dans la projection, mais Pastore est dans la création pure. Il est capable de générer du danger et d'allumer la lumière même quand la situation de jeu n'est a priori pas favorable. En contre, le timing de ses transmissions est redoutable, mais le garçon est tout aussi à même de prendre à défaut une défense regroupée sur attaque placée, comme son match face à Lyon l'a démontré.
Que dire de sa prestation face à Tolisso et compagnie? Ce fut un véritable récital, un pur régal d'esthète, une performance de haut vol. Deux caviars à la louche et des gestes de classe mondiale, le tout servi avec l'élégance absolue qu'il dégage quand il atteint cette sorte d'état de grâce. Qu'on arrête de nous les hacher menu (décidément elles prennent cher dans ce papier, il va falloir les ménager un peu) avec les Memphis Depay, les Lucas, les Coman et tous les dragsters à œillères de la planète fouteballe qui regardent plus le ballon que le jeu autour d'eux et cherchent toujours l'exploit individuel, le dribble de jeu vidéo pour compilation YouTube.
C'est pour des espèces en voie d'extinction comme Javier qu'on regarde du fouteballe, pour des mecs qui ne possèdent pas de qualités physiques hors du commun (on parle d'une brindille en l'occurrence) mais expliquent la vie à tout le monde et nous réconcilient avec un sport qui nous fait souvent trop de mal (au prochain but de la tête de Sergio Ramos dans les arrêts de jeu, je me rends dare-dare dans l'église la plus proche pour demander des comptes au big boss, faut pas déconner non plus, enough is enough).
Dans la phase morose et post-cataclysmique que traverse le PSG, le retour de Pastore est plus qu'une éclaircie: c'est une véritable bénédiction. Rien ne dit qu'il conduira les troupes vers un titre qui s'échappe un peu plus à chaque journée, mais il va donner du plaisir à tous ceux qui savent l'apprécier à sa juste valeur et désespéraient de le voir éloigné si longtemps des terrains. S'il subsiste un semblant de justice immanente dans ce jeu qui n'en finit plus de consacrer des types insupportables ("attention à ce corner de la dernière chance, on connaît la qualité des Madrilènes dans le jeu aérien") soutenus par des fans encore plus insupportables, Pastore n'aura pas à subir un destin à la Gourcuff et sera un tantinet épargné par les blessures.
Il faut prendre conscience que Javier n'est pas seulement un joyau, une perle rare, un poète des pelouses, un technicien hors pair (ce serait déjà pas mal ceci dit), mais aussi et surtout un joueur qui fait gagner son équipe parce qu'il rend tout le monde autour de lui meilleur. A bientôt 28 ans, il lui reste quelques années pour clouer le bec des tristes sires. Espérons que ses plus belles heures soient encore devant lui. Courage, Javier. Un jour on les aura.
"les Memphis Depay, les Lucas, les Coman et tous les dragsters à œillères de la planète fouteballe qui regardent plus le ballon que le jeu autour d'eux et cherchent toujours l'exploit individuel, le dribble de jeu vidéo pour compilation YouTube."
RépondreSupprimer-> Tellement vrai ! La fin du foot en tant que sport co ces mecs là