"La renaissance". C'est le titre qu'a choisi le torchon préféré des amateurs de sport de ce pauvre pays, qui étant donné ses faibles compétences en langues étrangères ne peut accéder au contenu souvent bien supérieur de la rubrique football du Guardian, au lendemain de la victoire 3-1 en Italie. La renaissance donc. Ben voyons. Alors qu'on a eu droit comme d'habitude à la formule maison (un Khroutchev pas piqué des hannetons, révisez vos classiques), à savoir sept bourrins (exception faite de Lucas Digne, qui s'impose comme une vraie alternative à Hernandez) et trois dragsters, aucun créateur au milieu (mais que diable fait Guendouzi dans cette équipe?) et un trio offensif d'une indigence technique cataclysmique, sans doute le plus faiblard jamais aligné en sélection. Résultat: pas une action construite digne de ce nom et trois buts marqués sur coups de pied arrêtés. Un sommet de réalisme cynique et froid. Rappelons que Kolo Muani est remplaçant au PSG (sans doute parce que Luis Enrique est un illuminé qui n'entend rien au football), que Nkunku ne joue pas en Premier League avec Chelsea et que l'indispensable Marcus Thuram compte désormais le total mirifique de deux buts en 29 sélections, marqués contre des équipes aussi redoutables que l'Irlande et Gibraltar. Rappelons également au passage, et pas seulement d'un train, qu'un joueur magnifique comme David Ginola, trop doué, trop grande gueule, trop artiste, s'est arrêté à 17 sélections. Mais, contrairement à Thuram, il n'assurait pas le repli défensif sur son côté gauche.
Qu'on ne nous rétorque pas que le réservoir à la disposition de Deschamps est limité. La vérité, c'est qu'au contraire d'un Fabien Galthié qui lui fait rêver l'esthète, il ne fait pas correctement son travail et reste prisonnier de ses convictions bornées et de ses certitudes obsolètes, lui qui en prime se pense indispensable après douze interminables années passées à la tête de la sélection. Il refuse de troquer son 4-3-3 immuable contre un 4-3-1-2 et d'installer un véritable meneur de jeu, de donner leur chance à Olise, Akliouche ou Cherki dans un rôle de numéro 10. Il ne considère pas une seule seconde la possibilité de sélectionner des Lees-Melou, des André, des Ekitike (tout simplement le Français le plus décisif en Europe cette saison) sous prétexte qu'ils ne jouent pas dans des "grands clubs". Il est vrai que André s'est juste payé le scalp du Real et de l'Atletico avec le LOSC en Champions League (il la regarde la CL le DD?), que Lees-Melou porte sur ses épaules un Stade Brestois qui n'en finit plus d'épater l'Europe et qu'Ekitike a juste planté contre le Bayern Munich. Deschamps aurait-il pris Olise si celui-ci était resté à Crystal Palace? Jamais de la vie. Suit-il les parcours de Mateta, Millot ou Diakité? Assurément pas. Il ne fait juste pas sérieusement son travail pour 2,5 millions d'euros annuels et propose le jeu le plus ennuyeux de l'histoire de l'équipe de France. Jamais remis en cause, jamais contesté, il a été prolongé avant un Euro au cours duquel la France a marqué un but dans le jeu en tout et pour tout.
Deschamps fait rouler son équipe dans le sens inverse de l'histoire et n'a apparemment pas remarqué que le football qui gagnait désormais se voulait résolument joueur, technique et offensif, comme le démontrent les succès de la Roja à l'Euro, la splendide victoire du Barça au Bernabeu (match durant lequel les soi-disant cadors Tchouameni et Camavinga se sont fait balader par le milieu blaugrana), les quatre titres consécutifs de City en Premier League, le parcours exceptionnel du Bayer Leverkusen la saison dernière, le jeu réjouissant de Liverpool, le titre de l'Atalanta Bergame en Ligue Europa ou les cartons du Bayern en Champions League. Qui sont les équivalents en équipe de France des Wirtz, Foden, Musiala, Bellingham, Vitinha, Barella, Odegaard ou Dani Olmo? Possède-t-on en magasin un joueur du calibre de Rodri, capable de récupérer, assurer la première passe vers l'avant, orienter à bon escient, donner des caviars et marquer? La réponse est sans doute négative mais on ne risque pas de le débusquer si l'on fait toujours confiance aux mêmes types surcotés comme Tchouameni, Camavinga ou Guendouzi. Est-ce la faute de la formation française? Sans doute, mais le règne sans partage de Deschamps a contribué à tuer dans l’œuf les potentiels héritiers de Kopa, Zidane, Micoud, Ziani, Carrière ou Martins en instaurant le culte du physico-physique au profit du QI football et en faisant d'un cheval de trait comme Sissoko l'archétype du milieu de terrain international français.
On nous jette à la figure le palmarès de Deschamps sur le banc des Bleus mais a-t-on oublié que son équipe a été incapable de battre un Portugal privé de Cristiano Ronaldo en finale de l'Euro 2016, qu'elle a pratiqué un football ultra-restrictif en 2018, qu'elle s'est fait piteusement sortir par la Suisse lors de l'Euro 2021 et qu'elle ne doit son parcours remarquable au Qatar qu'à un Mbappé littéralement en feu? On nous rabat les oreilles des qualités de meneur d'hommes du sélectionneur en omettant le fait qu'il a réussi à dégoûter un fidèle soldat comme Griezmann de la sélection en le baladant à tous les postes possibles et en refilant le brassard à Kyky alors que tout plaidait pour qu'il revienne à Grizou, véritable capitaine de route toujours exemplaire en bleu. A la question qui ferait mieux que Deschamps, nous répondons à peu près n'importe qui, et ce à tous les niveaux, aussi bien celui d'un projet de jeu inexistant, de l'égalité des chances accordée à tous d'accéder à la sélection, du discours lénifiant tenu après chaque performance plus insipide que la précédente ou de la gestion d'un groupe qui ne soutient son sélectionneur simplement parce que certains doivent mesurer la chance qu'ils ont de figurer dans le groupe France au vu de leurs prestations. En un mot, Macron président de la République et Deschamps sélectionneur, même combat, à savoir un scandale permanent.
Ça va toi sinon ? Un peu dur ce début d'automne, non ?
RépondreSupprimerT'as tout compris mec, tout !!!
RépondreSupprimerUn peu sévère, mais pas faux. L'équipe ne joue pas et ne fait pas rêver, ses joueurs ne font pas rêver, beaucoup sont des nobody, le niveau semble baisser, et je regrette autant que toi qu'aucun vrai 9 et aucun 10 technique et créatif n'ait émergé.
RépondreSupprimerHe ben , un beau costume bien chaud pour l'hiver le D D. Je me suis régalé à lire tout ça.
RépondreSupprimerCerise sur le cake. L'analogie avec macaron le prétentieux imbécile. Parfait. Merci pour ce moment
Le billet d’humeur de Marcel.
RépondreSupprimerDeschamps est il la cause ou le symptôme d'un foot français complètement hors de sujet depuis 20 ans ? Vous avez 2 heures :) mais ce que produit la FFF comme politique voir philosophie du football depuis bien longtemps ne peut qu'amener à promouvoir DD à la tête de la sélection...un petit mieux au niveau des clubs ces tout derniers temps peut être ?
RépondreSupprimerExcellente analyse. Ceci étant dit, certains joueurs qui sous-performent sous Dédé pourraient mieux s'en tirer sous une autre constellation. Genre Thuram. Nan ?
RépondreSupprimer