Lorsque
l'on évoque les meilleurs joueurs espagnols de ces vingt dernières
années (pour la simple et bonne raison que l'on a que ça à faire en
attendant l'apocalypse qui ne saurait désormais tarder), les noms de
Raul, Xavi ou de Luis Enrique viennent plus naturellement à l'esprit que
celui de Fernando Hierro. Pourtant, ce joueur au profil atypique fut
pendant près de quinze ans l'un des piliers du Real Madrid, avec lequel
il s'est forgé un palmarès long comme le bras, et de la sélection
nationale.
Milieu
de terrain rapidement reconverti libero, Hierro ne brillait ni par sa
vivacité ni par ses aptitudes naturelles de défenseur, mais possédait
une qualité de frappe exceptionnelle qui lui permettait de jouer long
avec une grande précision et d'asséner des coups francs tonitruants.
Aussi bien en club qu'avec la Roja, il jouait un rôle semblable à celui
de Koeman au sein du Barça de Cruyff, à savoir celui de rampe de
lancement, de premier relanceur. Il se distinguait également par ses
qualités de meneur d'hommes qui lui valurent de porter le brassard à de
nombreuses reprises avec le Real et l'équipe nationale. Posé, calme,
intelligent tactiquement, il avait l'étoffe du patron, et a d'ailleurs
occupé les fonctions de directeur sportif de la Roja de 2007 à 2011,
avant de prendre les commandes de Malaga l'éte dernier.
Au
Real Madrid, pour lequel il a disputé plus de 400 matches de Liga et
plus de 100 rencontres européennes de 1989 à 2003, Hierro s'est imposé
comme le digne héritier du défenseur central Manuel Sanchis, figure
historique du club, à qui il succèda le plus logiquement du monde au
capitanat. En quatorze saisons de championnat, il a inscrit cinq buts ou
plus à douze reprises, statistique tout à fait remarquable pour un
joueur évoluant à son poste, même si elle inclut les nombreux penaltys
qu'il avait la charge et le privilège de transformer.
Déja
vainqueur du championnat en 1990, 1995 et 1997, Hierro étoffe
considérablement son palmarès sur la fin de sa carrière et une fois la
trentaine passée. En 2001 et 2003, il s'adjuge deux nouveaux titres
nationaux, mais remporte surtout trois fois la Champions League en 1998,
2000 et 2002, d'abord aux côtés des Seedorf, Redondo, Mijatovic et
Suker, puis plus tard des Figo, Zidane ou McManaman. Hierro fait partie
du noyau de joueurs qui ont activement contribué à ces trois succès
européens, puisqu'il a participé à plus de 60 rencontres de Champions
League entre 1997 et 2002.
Ils
ne sont d'ailleurs que quatre à avoir pris part aux trois campagnes
victorieuses: Raul, Morientes, Roberto Carlos et Hierro, qui fut
cependant remplaçant à l'occasion de la finale de Paris contre Valence
en 2000, pour laquelle Del Bosque avait aligné Karanka, Ivan Campo et
Helguera au coeur de sa défense à cinq. Une fois le match plié, le futur
sélectionneur fit entrer Hierro à cinq minutes de la fin à la place de
Salgado pour l'associer au triomphe: à tout seigneur tout honneur. Il
eût été inconcevable que Hierro, joueur emblématique de ce Real
dominant, reste cloué sur le banc de touche jusqu'au coup de sifflet
final. Symboliquement, Del Bosque avait déjà remplacé Anelka par Sanchis
cinq minutes auparavant.
Capitaine
d'une équipe qui avait clairement les moyens d'aller au bout en 2002,
il se voit privé de son rêve par un arbitrage scandaleux contre la Corée
du Sud, l'un des deux pays hôtes de la compétition. A trente-quatre
ans, il s'agissait de sa dernière chance de parachever une longue
carrière magnifiquement remplie et marquée du sceau de la régularité, de
l'excellence et du professionalisme. Joueur exemplaire et
charismatique, Fernando Hierro fait à coup sûr partie des plus grands
joueurs de l'histoire du football ibérique. Espérons simplement que le
présent article aura contribué à lui rendre justice.
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