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mardi 22 mars 2011

Faut-il supprimer le penalty?

Lorsque le score d'un match est serré et l'issue incertaine, l'obtention d'un penalty constitue forcément un tournant décisif dans le scénario, pour peu qu'il soit transformé évidemment. Plus encore qu'une expulsion, handicap surmontable avec un minimum de réorganisation tactique, la possibilité donnée à l'adversaire de marquer prend fatalement des allures de punition suprême. Trop souvent, le choix d'accorder ou non un coup de pied de réparation à l'une ou l'autre équipe reste au coup de sifflet final le fait majeur d'une rencontre. 


Dans l'absolu, le penalty doit venir sanctionner une faute commise dans la zone de vérité et offrir à l'équipe qui l'obtient l'opportunité de marquer un but dont l'a privé dans le jeu un geste illicite de l'adversaire. Dans les faits, il existe fréquemment un écart presque scandaleux entre la probabilité que l'action qui amène le penalty débouche sur un but et la situation qui découle du coup de sifflet, à savoir un face à face avec le gardien. De par cette disproportion, la sanction, censée réparer une injustice, devient elle-même source d'injustice, même si la faute existe bel et bien. L'arbitre peut en prime l'alourdir d'un carton rouge, double peine qui pèse d'un poids trop important dans le résultat final.
 
Le problème réside essentiellement dans le fait que tous les gestes répréhensibles dans la surface soient considérés sans aucune distinction et se voient sanctionnés d'une seule et même manière. De façon aberrante, un penalty peut être sifflé tout aussi bien pour une main plus ou moins volontaire, une bousculade sur corner ou un attentat par derrière sur un attaquant qui file seul au but. L'arbitre devrait pouvoir avoir le choix entre une variété de possibilités suivant la gravité de la faute commise et la situation de jeu. En l'absence d'entre-deux et de juste milieu, l'arbitrage dans la surface de réparation reste le royaume du tout ou rien et de la binarité idiote. 

Lorsqu'un gardien s'empare à la main d'une passe en retrait volontaire, l'équipe adverse se voit normalement accorder un coup franc indirect dans la surface. Pourquoi ne pourrait-on pas avoir plus souvent recours à cette solution intermédiaire pour les fautes de mains involontaires, les tirages de maillot intempestifs ou les contacts qui n'empêchent pas un joueur de tirer au but? Du fait de l'importance démesurée du penalty, les
arbitres peuvent hésiter à porter le sifflet à la bouche, ce qui laisse le champ libre aux défenseurs vicieux qui multiplient les actes litigieux sans jamais franchir la ligne rouge qui pénaliserait leur équipe. Paradoxalement, un des effets pervers du penalty consiste à avoir transformé la surface en zone de non-droit, où sont tolérées des fautes qui se verraient sanctionnées ailleurs.
 
La question de la main volontaire ou involontaire, qui revient incessamment sur le tapis depuis Marius Trésor, reste un imbroglio sans nom, deux actions identiques pouvant donner lieu à des jugements radicalement opposés. Sauf en cas de plongeon caractérisé ou de sauvetage sur la ligne façon gardien de but, il est quasiment impossible de décider si l'action est intentionnelle ou non. Quand un joueur se jette pour contrer une frappe, ses bras se décollent naturellement du corps. Peut-on pour autant parler d'acte manifeste d'anti-jeu? Il est encore plus absurde de voir un penalty sifflé lorsque le défenseur reste debout et voit le ballon venir lui percuter un bras gardé le long du corps. Pas sanctionnable en théorie, ce non-geste l'est souvent dans la réalité. 

L'exemple de la parade de Suarez face au Ghana lors de la dernière Coupe du Monde a démontré que le penalty ne constituait pas la réponse adaptée à une faute de main délibérée, car au final, son arrêt désespéré a permis à son équipe de se qualifier. Puisque le but aurait été marqué sans son intervention, le Ghana aurait dû bénéficier d'un but de pénalité, ce que ne prévoit malheureusement pas le règlement. L'instauration du but de pénalité permettrait de punir plus justement tout type d'action empêchant un but autrement inévitable, sans donner l'espoir au coupable de voir le tireur manquer son penalty. En l'état actuel des choses, et particulièrement en fin de match, il n'a pas grand-chose à perdre.
 
Tant que les esprits réactionnaires des instances dirigeantes refuseront l'introduction de la vidéo dans l'arbitrage, les hommes au sifflet continueront à porter seuls le poids de choix lourds de conséquences, et de
nombreux penalties ne manqueront pas de faire débat chaque semaine sur toutes les pelouses de la planète. Cette obstination incompréhensible permet à tous les simulateurs professionnels de tromper régulièrement leur monde et de se voir récompenser de leurs méfaits sous la forme d'un but quasiment offert sur un plateau à leur équipe. Trop de matches se sont décidés et se décideront encore sur des fautes inexistantes dans la surface. 

Les mauvaises langues, aussi prompts à l'ouvrir que les tristement célèbres d'aucuns, feront sans doute remarquer que le penalty reste le moyen le plus sûr et le plus efficace d'avantager une équipe, et que sa suppression, pour l'instant pas franchement au programme, causerait un tort non négligeable à certaines équipes bénéficiant régulièrement des largesses arbitrales. Quand on voit le nombre de décisions contestables prises journée après journée en faveur des grosses écuries dans les différents championnats européens, on se dit que le penalty a encore de beaux jours devant lui.

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