En
1997, Christian Vieri remporte avec la Juventus son premier titre de
champion, à vingt-quatre ans. Ce qu'il ignore alors, c'est qu'il n'en
gagnera jamais d'autre, en Italie ou ailleurs, et devra se contenter de
deux succès en Coppa Italia et d'une Coupe des Coupes avec la Lazio: un
palmarès famélique pour un des tout meilleurs attaquants de sa
génération, qui ne s'est jamais trouvé au bon endroit au bon moment.
Joueur d'une puissance dévastatrice et au gabarit de déménageur (1,87m,
80kg), Vieri dominait physiquement mais faisait également montre d'une
finesse technique au-dessus de la moyenne et d'une grande subtilité
gestuelle devant le but.
A
la fois redoutablement efficace, costaud dans le jeu aérien et
intelligent dans ses déplacements, il présentait le profil du parfait
avant-centre. Malheureusement, la carrière de ce géant des surfaces fut
perturbée par des blessures en tous genres qui lui laissèrent trop
rarement l'occasion de disputer une saison dans son intégralité et
d'atteindre des sommets statistiques. Si son corps avait bien voulu le
laisser tranquille, il aurait peut-être planté les quelques pions
supplémentaires qui lui auraient permis d'étoffer son palmarès. A
l'heure du bilan, il peut légitimement nourrir quelques regrets.
Révélé
sous le maillot de la Vecchia Signora aux côtés de Zidane et Deschamps,
avec qui il dispute une finale de Champions League contre le Borussia
Dortmund, Vieri prend tout le monde à contre-pied en signant pour
l'Atletico Madrid du légendaire Jesus Gil. En Espagne, il prend une
dimension nouvelle et se voit sacré pichichi avec 24
réalisations en autant d'apparitions. Ses performances marquent les
esprits, tout comme son improbable but marqué depuis la ligne de sortie
de but, et attisent les convoitises au pays. C'est finalement la Lazio
qui rafle la mise, mais Vieri ne dispute qu'une vingtaine de matches de
Serie A avec les bleu ciel, marquant tout de même sa douzaine de buts au
passage, dont un en finale de Coupe des Coupes contre Majorque à Villa
Park.
Guère
rebuté par la fragilité du joueur, Moratti rêve d'associer Vieri à
Ronaldo sous les couleurs nerrazzurri, après avoir copieusement bavé sur
Batistuta. A l'été 1999, le président de l'Inter se fend d'un chèque
extravagant pour attirer le buteur de la Nazionale à Milan. Aux anges, les tifosi du club pensent voir débarquer le fuoriclasse
qui va permettre à leurs favoris de dominer la concurrence et
s'installer durablement au sommet de la Serie A. Vieri, quant à lui,
intègre une formation ambitieuse à la hauteur de son talent.
Dans
les faits, le tandem Vieri-Ronaldo n'existe que de manière
intermittente, tant l'un comme l'autre sont embêtés par les pépins
physiques. Après avoir changé de tunique pour la troisième fois en trois
ans, l' attaquant italien se sédentarise et dispute six saisons
consécutives avec l'Inter, à qui il donne ses meilleures années. Entre
1999 et 2005, il marque 103 buts en 143 rencontres de championnat, ne
descendant jamais sous la barre des treize buts. Impressionnant de
régularité, il franchit deux fois le cap des vingt réalisations,
finissant capocanoniere en 2003 avec 24 buts en 23 matches.
Sa
présence sur le terrain représentait quasiment l'assurance d'un but, et
nul doute que si les blessures l'avaient épargné il aurait atteint à
plusieurs reprises le total de trente buts. Au début des années 2000,
Vieri, inarrêtable, est à son zénith, et son départ de l'Inter coïncide
avec le début d'un laborieux périple qui le mènera sans grand succès de
Monaco à Florence en passant par Bergame: une fin de parcours pas très
glorieuse qui lui valut non sans raison d'être accusé de courir le
cachet. A 38 ans ans, il évolue aujourd'hui au Boavista Saquarema, club
de l'état de Rio.
Lippi
a depuis ouvertement admis que Vieri aurait figuré sur sa liste s'il
avait été sur pied. Les mauvaises langues diront que l'équipe nationale a
obtenu de meilleurs résultats sans lui et le classeront volontiers dans
la catégorie des chats noirs (en 2004, il reste muet et l'Italie se
fait sortir au premier tour), mais la vérité n'est pas aussi simple.
Avec Del Piero et Totti, il fut pendant quelques années l'atout offensif
numéro un de la sélection (23 buts en 49 capes), et il faudrait être
sacrément pervers pour considérer a posteriori ses absences comme l'une des raisons des derniers succès italiens.

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