
A
ce jour, la dernière équipe issue d'Europe orientale à avoir atteint la
dernière marche de la compétition reste l'Etoile Rouge de Belgrade,
vainqueur de l'édition 1991 contre l'Olympique de Marseille. Depuis,
sept pays se sont partagés les places de finalistes, les quatre nations
majeures ne laissant que des miettes à la concurrence: Italie (12),
Espagne (10), Angleterre (9), Allemagne (6), France (2), Pays-Bas (2),
Portugal (1). Etant donné le poids croissant de la puissance financière
et la concentration massive des moyens, il est à peu près certain qu'on
ne verra plus jamais un club roumain, serbe ou croate mettre la main sur
le trophée, et seuls Russes et Ukrainiens semblent en mesure de
rivaliser grâce à leurs pétrodollars (le Chakhtar Donetsk a d'ailleurs
joué un quart de finale en 2011 contre Barcelone).
D'un
point de vue français, on a l'habitude d'entendre que l'OM était sur le
papier le grand favori de la finale de Bari et que sa défaite aux tirs
aux buts eut l'effet d'une mauvaise surprise. Certes, les champions de
France possédaient avec le fameux trio Abedi Pelé-Waddle-Papin une force de frappe sans beaucoup d'équivalent sur
le continent (trente buts européens à eux trois entre 1989 et 1993) et
derrière, la défense de ballerines Di Meco-Mozer-Boli-Amoros avait de
quoi faire trembler les cannes du plus kamikaze des attaquants.

La
composition du milieu de terrain yougloslave donne une idée de la
qualité technique de l'Etoile Rouge millésime 1991: Sinisa Mihajlovic,
Vladimir Jugovic, Robert Prosinecki et Dejan Savicevic. Au sein de ce
quatuor somptueux, où se mêlent créativité et sobriété, Savicevic, né en
1965 et présent au club depuis 1988, fait figure d'ancien, puisque les
trois autres n'ont alors que vingt-deux ans. Prosinecki, véritable
surdoué du football yougoslave et seul membre de l'équipe né en Croatie,
n'a jamais réussi à s'imposer dans un grand club étranger (Real et
Barcelone notamment), contrairement à Mihajlovic, Jugovic et Savicevic,
auteur de brillantes carrières en Italie, les deux derniers cités
remportant même à nouveau la coupe aux grandes oreilles, respectivement
avec la Juventus en 1996 et le Milan AC en 1994.
Le
trio totalise plus de 600 matches et près de cent buts en Serie A, 120
matches de Champions League (25 buts) et 157 sélections en équipe de
Yougloslavie puis de Serbie (35 buts) entre 1991 et 2003. En 1999,
Savicevic signe un retour-éclair à l'Etoile Rouge, ne disputant que que
trois matches avec le club qui le révéla aux yeux de l'Europe avant de
rejoindre le Rapid de Vienne, où il rendra encore de jolis services
jusqu'à ses trente-six printemps.

Lorsqu'une
une équipe formée presque exclusivement de joueurs du cru, comme ce fut
le cas avec l'Etoile Rouge cette année-là, la fuite des talents devient
presque inévitable. Certains en profitent pour signer un contrat
juteux, s'offrir la belle vie et franchir un palier sur le plan de la
notoriété. D'autres, dont le talent ne pouvait s'exprimer que dans le
cadre d'un collectif huilé et sous les couleurs de leur premier maillot,
traînent comme un boulet leur incapacité à s'adapter à un autre
contexte et doivent se contenter de bien agréables souvenirs. La page
fut aussi courte que belle, et beaucoup se satisferaient d'avoir
contribué à hisser leur club formateur jusqu'aux sommets du football
européen.
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