Vainqueur
puis finaliste de la Champions League avec l'Ajax Amsterdam au milieu
des années 90, Jari Litmanen aurait pu se voir décerner le Ballon d'Or,
qu'il méritait largement autant que Weah ou Sammer. Au-dessus du lot
techniquement, efficace dans les dix-huit mètres adverses et tourné vers
le collectif (mentalité made in Ajax oblige), Litmanen n'était ni un
véritable avant-centre ni un meneur de jeu, mais aimait évoluer entre le
milieu et l'attaque et faire parler son flair et son sens du jeu. S'il
marquait beaucoup, il savait faire bonne usage de la chique et ne tirait
jamais la couverture à lui, ce qui l'a peut être desservi à l'heure des
votes pour l'attribution des récompenses individuelles.
Avec
son physique filiforme et son visage de premier de la classe, le
Finlandais incarne une forme de classicisme, de simplicité et de
football à l'ancienne, à l'opposé des stéréotypes attachés aux stars du
ballon rond. Plus considéré par les spécialistes et les esthètes du jeu
que par le grand public, Litmanen a notamment souffert de n'avoir jamais
brillé ailleurs qu'à l'Ajax, en partie à cause de blessures récurrentes
qui ont pourri sa fin de carrière. Talent isolé au sein d'une faiblarde
sélection finlandaise, il n'a participé à aucun tournoi international,
ce qui n'a guère contribué à sa reconnaissance.
A
vingt-et-un ans, le jeune joueur de MyPa 47 tape dans l'oeil d'un
recruteur de l'Ajax lors d'une finale de coupe de Finlande, au cours de
laquelle il inscrit un but: c'est le début d'une riche histoire sous le
maillot rouge et blanc qui va durer sept ans. Après une première saison
difficile essentiellement passée au sein de la réserve, Litmanen profite du départ du prodige local Dennis Bergkamp
pour s'imposer dans l'équipe première et planter 26 buts en 30 matches
de championnat, ce qui lui vaut d'être élu joueur de l'année aux
Pays-Bas. En 1994-95, il participe pleinement à la campagne victorieuse
en Champions League, marquant notamment un doublé contre le Bayern en
demi-finale et accédant au podium lors de l'élection du Ballon d'Or
(troisième derrière Weah et Klinsmann).
En 1999, Litmanen signe à Barcelone, où il rejoint nombre de ses
anciens partenaires de l'Ajax (Reiziger, les frangins De Boer, Kluivert,
Bogarde) et Louis Van Gaal, l'entraîneur des années glorieuses. Embêté
par des pépins physiques à répétition, il partage son temps entre
l'infirmerie et le banc de touche et, suite au remplacement de Van Gaal
par Sera Ferrer, accepte une proposition de Liverpool. Houiller porte le
joueur en très haute estime, mais la poisse poursuit Litmanen, qui ne
prend part à aucune des trois finales victorieuses des Reds en 2001 (League Cup, FA Cup et Coupe UEFA). A trente ans, sa chance de
s'imposer comme un joueur majeur dans un grand championnat est passée,
et le Finlandais, libre de tout contrat, décide de revenir à l'Ajax
après trois années de galères et de frustrations.
Fragilisé par les blessures à répétition, il ne signera plus une seule saison
pleine et deviendra une sorte de journeyman de luxe à qui des clubs
font appel pour une opération maintien (Hansa Rostock) ou quand ils
visent une qualification en Champions League (Malmö). A trente-sept
berges, il signe un contrat avec Fulham, qu'il quittera sans avoir porté
le maillot de l'équipe première.
Auteur
de 32 buts en 137 sélections, il est devenu en novembre 2010 le plus
vieux joueur à marquer dans une rencontre d'éliminatoires pour le
championnat d'Europe en transformant un penalty face à Saint-Marin, pour
ce qui reste à ce jour son dernier but international. Appelé pour la
première fois en 1989, il occupe la vingt-troisième place au classement
des joueurs les plus capés tous pays confondus, juste derrière des
monstres sacrés tels que Matthaus, Cafu ou Thuram. Autant pour sa
longévité et son comportement de gentleman des pelouses que sa
virtuosité et son élégance, le monsieur mérite le plus profond respect.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire