
A l'entendre, Benzema est le principal
responsable de l'inefficacité chronique de la sélection, incapable de
trouver la faille contre le Japon. Si les dires du sinistre du
microphone ne trouvaient guère d'écho, cela ne vaudrait même pas la
peine de les évoquer ici, mais, malheureusement, son opinion est
largement partagée: nombreux sont les parasites de plateau et les
piliers de comptoir qui font porter le chapeau à l'ancien Lyonnais,
accusé de tous les maux imaginables. A en écouter certains, Benzema, qui
bénéficierait d'un traitement de faveur, ne mériterait même pas une
place de titulaire en équipe de France. D'autres attaquants, paraît-il,
feraient mieux le boulot.
S'il
veut de la statistique parlante, le populo de studio, nous pouvons lui
en fournir: en 2011-2012, Benzema a planté 32 pions en 52 matches avec
le Real (21 en 34 matches de Liga, 7 en 11 matches de Champions League, 4
en 7 matches du Coupe du Roi). Cette saison, il a déjà trouvé les
filets à deux reprises en Champions League. Contrairement au consultant
favori des ménagères, nous ne prétendons pas détenir la science infuse,
mais à notre très humble avis il semble tout de même à première vue
qu'il s'agisse là de chiffres dignes d'un buteur, mais peut-être nous
avançons-nous. Rappelons au passage que Benzema a terminé meilleur
buteur de Ligue 1 en 2008 (37 buts en 72 matches entre 2006 et 2008 avec
l'OL), ce qui tendrait à prouver que le garçon possède certaines
aptitudes devant les cages.

Il
ne faudrait pas perdre de vue que le rôle du buteur consiste à conclure
efficacement les mouvements collectifs de son équipe et à terminer au
mieux le travail. Au Real, Benzema hérite de bons ballons parce qu'il
joue aux côtés de passeurs émérites tels que Özil, Xabi Alonso et Di
Maria. Techniquement au-dessus de la moyenne, il ne se contente pas
d'attendre les offrandes de ses partenaires, mais participe activement à
la construction des actions et distribue du caviar en retour. En équipe
de France, Benzema se trouve manifestement trop isolé et n'est guère
soutenu par des pourvoyeurs de qualité, mis à part Cabaye, avec qui sa
relation reste perfectible (nous ne parlerons pas du cas Nasri par pure
décence). S'il décroche autant et vient chercher les ballons aussi bas,
c'est tout simplement parce que l'équipe s'avère incapable de le trouver
s'il reste en pointe.
Comment
peut-on stigmatiser son manque d'efficacité alors qu'il n'a pas la
moindre occasion à se mettre sous la dent? Pourquoi lui reprocher de
déserter le front de l'attaque et de vouloir créer l'étincelle quand
rien ne se passe? Outre le fait qu'il a marqué des buts importants sous
l'ère Blanc, on tend à négliger les dix passes décisives de Benzema en
sélection. Est-ce un réel problème de disposer d'un attaquant qui sent
le jeu et sait faire jouer les autres? De façon paradoxale, ce sont
précisément ses qualités qui sont retenues contre lui.
Apparemment,
beaucoup de gens n'ont toujours pas compris la différence entre un bon
joueur de Ligue 1 et un attaquant de calibre mondial. L'Espagne a Torres
et Villa, l'Angleterre a Rooney, l'Allemagne a Klose et Gomez, et la
France a Benzema: point barre. Le poste d'attaquant de pointe ne saurait
revenir à personne d'autre, et aucun joueur français ne possède le
talent et l'envergure pour prétendre prendre sa place. La question ne se
pose même pas, tant l'écart entre lui et les autres reste considérable.
Au lieu de sans cesse remettre en cause son statut et de chercher des
alternatives inexistantes, on devrait plutôt chercher à mettre l'équipe à
son service et à le placer dans les meilleures conditions possibles.
Des joueurs de cette qualité, nous n'en avons pas des caisses en
magasin.
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