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mercredi 21 novembre 2012

Riquelme, le playmaker

riquelmePour diverses raisons, Juan Roman Riquelme n'a pas fait la carrière que son immense talent lui promettait. Idole des fans de Boca Juniors, club où il jouit d'un statut quasi-divin, il possédait assez de qualités pour s'imposer comme le patron d'un grand club européen, mais son passage au Barça se solda par un échec, la faute à Van Gaal et à un mental et une implication pas toujours à la hauteur de son génie. Riquelme a toujours traîné une réputation de dilettante brillant, d'artiste fragile, et, disons-le tout net, de cinglé notoire, qui lui a valu de sérieux soucis relationnels avec ses entraîneurs et sélectionneurs et l'a privé de plusieurs rendez-vous majeurs.


Il fait partie de ces oiseaux rares qui ne font pas de plan de carrière, ne sont pas mûs par l'ambition ou l'appât du gain et ne cherchent pas spécialement à collectionner les trophées et les récompenses, mais cherchent simplement à prendre et donner du plaisir sur le terrain. Le nom de Riquelme fait fantasmer les vrais esthètes du jeu et les hédonistes du ballon rond, ceux qui placeront toujours le beau geste et le plaisir visuel au-dessus des notions d'efficacité et de résultat. S'il fallait retenir une seule et unique raison de vouer le football dit moderne (comprenez rapide, froid, physique, intense, clinique) aux gémonies, ce serait précisément qu'il ne laisse plus aucune place à ce genre de phénomènes atypiques qui résistent à toute classification et à toute théorisation de tableau noir.

riquelme2En termes de dons et d'aptitudes techniques, Riquelme n'avait strictement rien à envier aux Zidane, Laudrup, ou Rui Costa, et partageait avec ces meneurs de jeu de légende le souci de faire jouer les autres, le goût de la passe juste, de l'ouverture lumineuse qui déséquilibre un bloc à elle seule (sa spéciale: le caviar à ras de terre et au coeur de la défense adverse sur un appel croisé d'un attaquant). Comme eux, Riquelme jouait la tête haute, voyait le jeu et lisait les situations avant les autres, et son pied magique faisait le reste. Pour un attaquant, jouer dans la même équipe que lui relevait de la bénédiction et représentait l'assurance de recevoir la chique dans le bon tempo et les meilleures conditions, de ne pas multiplier en vain les appels et les sollicitations.

Précis sur coup de pied arrêté et dans le jeu long, dribbleur hors pair, doté d'un sens unique du contre-pied et d'une frappe de balle redoutable, inspiré et créatif, il présentait le profil du numéro dix rêvé. S'il préférait la plupart du temps jouer en marchant et diriger la manoeuvre en parcourant un minimum de distance (les virtuoses ne courent pas, étonnant que Norman Mailer n'ait pas donné ce titre à un de ses très recommandables bouquins), c'était un faux lent qui pouvait placer de surprenantes accélérations. Il savait se servir avec une facilité aberrante de toutes les surfaces du pied et contrôler une transversale de la semelle droite avant de régaler d'un extérieur gauche d'école. Tenter de lui prendre le cuir dans les pieds pouvait provoquer de sérieux maux de tête.

Après une saison passée sous les couleurs d'Argentinos Juniors, le jeune Juan Roman Riquelme rejoint les rangs de Boca en 1996 et dispute son premier match à la Bombonera, l'enceinte surchauffée du club, à dix-huit ans. Il remporte deux fois consécutivement la Copa Libertadores en 2001 et 2002 et s'envole pour Barcelone avec le statut de meilleur joueur sud-américain du moment. Malheureusement, Riquelme n'entre pas dans les plans de Van Gaal, qui ne le titularise que rarement et l'exile sur l'aile quand les qualités naturelles de l'Argentin exigent de le placer au coeur du jeu.

C'est finalement Villareal qui sent la bonne affaire et parvient à obtenir le prêt du meneur de jeu en 2003, alors que Ronaldinho vient de signer au Barça. Chez les jaunards, Riquelme retrouve ses deux anciens coéquipiers Sorin et Arruabarrena et se voit confier les clés de la boutique. Résultat: 35 buts marqués en trois saisons, une pelletée de passes décisives, une troisième place en Liga en 2005 et une qualification pour le dernier carré de la Champions League l'année suivante. D'abord prêté à son ancien club, il trouve un accord avec Villareal pour un transfert définitif à Boca en 2008. Il dispute une nouvelle finale de Copa Libertadores en 2012, perdue face aux Corinthians, et annonce son départ dans la foulée, malgré les supplications de milliers de supporters venus se masser devant le stade de Buenos Aires.

Malgré sa cinquantaine de sélections, Riquelme a longtemps entretenu une relation compliquée avec l'Albiceleste, comme de nombreux autres cadors du football argentin. Pas retenu par Bielsa en 2002 alors qu'il fait partie des meilleurs du monde à son  poste, il doit attendre quatre ans de plus  pour disputer  son premier tournoi mondial. Pekerman fait de lui le leader technique d'une équipe extraordinaire sur le papier mais qui échoue en quart de finale face à l'hôte allemand.


Après avoir annoncé son retrait de l'équipe nationale suite à de violentes critiques à son encontre, Riquelme fait son retour sous le maillot bleu ciel et blanc en 2007, année où il brille (cinq buts et cinq passes décisives) dans'une Copa America perdue contre le Brésil en finale. L'année suivante, à Pékin, il devient champion olympique aux côtés de Messi, Di Maria, Aguero et Lavezzi et prend sa revanche sur la Seleçao, contre qui il marque un but sur penalty en demi-finale. Il s'agit du seul titre international remporté par Riquelme, exception faite du titre mondial obtenu avec les moins de vingt ans en 1997 en Malaisie. Malgré de jolies prestations lors des éliminatoires pour le Mondial 2010, il dit définitivement adieu à la sélection en 2008 suite à un différend avec Maradona. En 51 apparitions avec l'Argentine, Riquelme a marqué 17 buts et délivré 22 passes décisives: des statistiques pas si minables pour un joueur à qui on a toujours plus ou moins reproché son manque d'efficacité.





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