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mercredi 5 octobre 2016

Varane à un tournant

Il y a trois ou quatre ans, Raphaël Varane marchait littéralement sur l'eau, et on avait l'impression d'assister à l'éclosion d'un véritable phénomène. A à peine vingt piges et tout juste débarqué de Lens avec seulement une vingtaine de matches de Ligue 2 dans les cannes, il avait enchaîné des prestations énormes, notamment en Champions League et lors des chocs face au Barça, récoltant les éloges de José Mourinho et de la presse espagnole. Il dégageait un calme et une sérénité de vieux briscard, reprenait les attaquants les plus rapides à la course, brillait dans la relance, défendait debout et proprement et semblait maîtriser absolument tous les paramètres qui font les grands défenseurs centraux. Le Real Madrid et l'équipe de France pensaient tenir la perle rare et pouvoir compter sur un baron pour les dix années à venir, d'autant qu'il disposait encore d'une belle marge de progression et ne pouvait semble-t-il que se bonifier avec les années. Mais comme le disent régulièrement les grands philosophes du jeu, tout va très vite en matière de fouteballe, et Varane est aujourd'hui au centre de nombreuses interrogations et à un tournant de sa jeune carrière.




En club, il a perdu sa place au profit d'un Pepe à nouveau monstrueux (il faut bien l'avouer, même si nous le détestons et qu'il ne devrait plus avoir de licence depuis un bail). En équipe de France, son duel aérien perdu face à Hummels en quart de Coupe du Monde lui a fait très mal, et il n'a pas eu l'occasion de faire taire les sceptiques lors de l'Euro, comme si la poisse lui collait aux crampons. En son absence, c'est Koscielny qui s'est imposé naturellement comme le véritable patron de la défense en faisait preuve de beaucoup de solidité et de régularité. Deschamps attend de Varane qu'il devienne un des leaders du groupe parce le fait de jouer dans un grand club compte beaucoup pour le sélectionneur, mais le Madrilène fait simplement partie des bons éléments de l'équipe, et non des cadres, et ce pour différentes raisons: il est encore très jeune, ne peut pas forcément l'ouvrir dans le vestiaire comme un Evra ou un Lloris, a manqué un tournoi organisé en France qui a soudé un collectif et n'impose pas le respect par ses performances en club, contrairement à un Griezmann par exemple, devenu le "go-to-guy" des Bleus. Un peu comme Pogba, Varane reste un talent en attente, un joueur qui a montré beaucoup de belles choses mais qui plafonne depuis un moment.




On lui reproche souvent d'être trop "soft", pas assez dur sur l'homme, rugueux, intraitable, costaud dans les duels, mais là n'est pas la question. Varane gagnerait peut-être effectivement à inspirer plus de crainte à l'adversaire, mais il possède un style propre, et c'est grâce à ses qualités qu'il doit franchir un nouveau palier: vitesse, anticipation, aisance technique, placement. Un joueur comme Marquinhos, qui présente des caractéristiques similaires et a à peu près le même âge (il est même un an plus jeune que Varane), offre plus de garanties que lui, même s'il n'est peut-être pas intrinsèquement meilleur. Pourquoi? Parce qu'il s'engage plus, met plus d'intensité dans ses interventions, fait preuve de davantage de concentration et d'implication. On aimerait parfois que Varane serre le poing et hurle sa rage de vaincre après un tacle réussi ou un geste décisif, qu'il montre qu'il n'est pas seulement un bon élève qui fait bien ce qu'on lui demande et applique les consignes mais aussi et surtout un gagneur, un compétiteur, un type prêt à laisser ses tripes sur le terrain et à monter le niveau d'un cran quand les circonstances l'exigent. Dans les grands rendez-vous, la classe naturelle ne suffit pas.




Il n'y a pas lieu non plus de s'inquiéter outre mesure pour Varane, d'abord parce qu'il se situe largement au-dessus de la concurrence à son poste chez les Bleus (Rami, Sakho, Laporte, Umtiti, sans même parler de Mangala, qui n'a plus sa place en sélection). Il faudrait avant tout que son corps le laisse tranquille et qu'il puisse retrouver du temps de jeu en club. Il n'a sans doute pas envie de quitter le Real et peut compter sur le soutien de Zidane, à l'origine de sa venue au club, mais devrait peut-être envisager de faire ses valises et demander un transfert. Il ne progressera pas en jouant quelques matches de Liga et de Coupe du Roi et en cirant le banc lors des gros matches, même s'il était titulaire à Dortmund. Pepe n'a après tout "que" trentre-trois ans, et vu sa forme actuelle et sa condition physique, il peut encore largement tenir le choc deux ou trois saisons. Comme Sergio Ramos est une véritable institution, l'horizon du défenseur français paraît quelque peu bouché, et il n'est pas certain que Deschamps continue à faire confiance à un joueur qui ne participe qu'à une poignée de matches par an. On a rarement vu un défenseur central atteindre son sommet avant ving-cinq ans, et il a donc du temps devant lui, mais sa situation est sans doute plus urgente qu'il n'y paraît. 








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