
Le
Portugal a trop souffert pour échouer si près du but. Il s'est arraché
pour renverser la vapeur en poules après la cuisante défaite lors du
match d'ouverture et s'est sorti les tripes pour sortir l'Angleterre au
bout d'une irrespirable série de tirs aux buts, puis les Pays-Bas dans
le match des losers du début des années 2000. La Seleccao a su résister à
l'étouffante pression populaire et médiatique pour se forcer un passage
jusqu'à la première grande finale de son histoire. Tous les ingrédients
sont réunis, le scénario paré de tous les attraits de la perfection, et
ce dernier match ne doit être en toute logique que le dernier chapitre
d'une épopée victorieuse.
Soutenu
par Maniche et Costinha, le quatuor Deco-Ronaldo-Figo-Pauleta doit
remettre les pendules à l'heure et mettre fin à l'énorme blague grecque,
qui n'amuse pas grand-monde sinon les Hellènes eux-mêmes et quelques
nostalgiques d'Helenio Herrera. L'aigle des Açores, qui n'a pas encore
marqué dans la compétition, possède le profil parfait du héros revenu de
nulle part pour claquer un mémorable doublé et faire chavirer l'Estadio
da Luz. En une demie-heure, la chose devrait être réglée, et la fête
pourra alors battre son plein.
Comme
prévu, les locaux campent dans le camp de l'adversaire, mais se
procurent très peu d'occasions au cours du premier acte, ne faisant que
tenter leur chance de loin par Miguel ou Maniche. A la mi-temps, les
chants des supporters grecs distillent le doute chez les joueurs et dans
les tribunes, et la menace d'une défaite aussi affligeante
qu'insupportable pèse à nouveau sur Lisbonne. Les coéquipiers de Figo
viennent sans cesse buter sur le bloc adverse et s'agacent, cherchant
vainement à trouver la faille sur un exploit personnel ou à provoquer un
improbable penalty.

Sur
trois coups de boule et trois victoires minimales, la Grèce a eu la
peau de tous ses adversaires, usés par sa rigueur tactique, son
hermétisme défensif et sa roublardise de tous les instants.
Ultra-limitée techniquement et régie par des principes réactionnaires,
l'équipe de Rehhagel est parvenue tour après tour à dérégler les plus
belles mécaniques adverses pour au bout du compte filer avec le magot.
Elle a fait un étendard de son cynisme et puisé sa force destructrice
dans son 'unité contre une critique unanime ainsi que dans un
anti-romantisme revendiqué.
Tout
au long du tournoi, la Grèce a pris un plaisir jouissif à jouer le rôle
du méchant que tout le monde veut voir dégager et qui met un point
d'honneur à survivre. On ne saura jamais si les Portugais, ultra-favoris
et nettement supérieurs à leurs vainqueurs en valeur pure, ont péché
par excès de confiance ou si leurs muscles ont été tétanisés par l'enjeu
écrasant du match, mais une chose est certaine: il aurait mieux valu
pour eux pour eux se frotter aux Tchèques qu'à cette vilaine clique de
briseurs de rêves.
4 juillet 2004, Estadio da Luz, Lisbonne: Portugal 0 - Grèce 1
But: Charisteas (57)
Portugal:
Ricardo - Miguel (Paulo Ferreira 43)- Ricardo Carvalho - Andrade -
Nuno Valente - Costinha (Rui Costa 60)- Maniche - Deco - Figo - Ronaldo
- Pauleta (Nuno Gomes 74)
Grèce:
Nikopolidis - Seitaridis - Dellas - Kapsis - Fyssas - Giannakopoulos
(Venetidis 76)- Basinas - Zagorakis - Katsouranis - Charisteas - Vryzas
(Papadopoulos 81)

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