Patrie
de certains des plus grands artistes de l'histoire du football mondial
dont il semble superflu de rappeler les noms, l'Argentine a également
produit nombre de défenseurs de grande classe pour le moins généreux
dans le contact, de Daniel Passarella à Oscar Ruggeri en passant par
Nestor Sensini ou Javier Zanetti. Roberto Ayala, arrière central
dominant au sommet de sa forme au début des années 2000, s'inscrit
pleinement dans cette grande tradition des défenseurs argentins, rugueux
et durs sur l'homme, amateurs de duels et de combats rapprochés,
intraitables en un contre un et dotés d'une grande intelligence
tactique.
Du
haut de son 1,77m, Ayala planait sur le jeu aérien grâce à des qualités
physiques peu communes et un engagement total. Dégageant une autorité
naturelle impressionnante, le bonhomme ne craignait aucun profil
d'attaquant, et pouvait tout aussi bien éteindre un petit gabarit vif et
dribbleur que prendre la mesure d'un avant-centre physique et
bagarreur. Jamais en reste question de mettre la semelle sans pour
autant qu'on puisse le qualifier d'odieux matraqueur, il imposait une
présence intimidante aux abords de sa surface et montrait l'exemple par
sa combativité et sa haine pure et simple de la défaite. Il incarne le
parfait chef d'arrière-garde que tout entraîneur sensé rêverait d'avoir
dans son équipe.
Après
trois années passées sous le maillot de Ferro Carril Oeste, club de
Buenos Aires fondé par des travailleurs du rail, Ayala rejoint les rangs
de la prestigieuse équipe de River Plate en 1994, où il côtoie des
joueurs aussi talentueux que Matias Almeyda, Ariel Ortega, Marcelo
Gallardo ou Hernan Crespo. Au terme de l'Apertura 1994-95 (le
championnat est scindé en deux phases aller et retour distinctes), le
club est sacré champion en restant invaincu en dix-neuf rencontres et en
n'encaissant que quatorze buts, grâce notamment aux remarquables
performances de sa nouvelle recrue défensive.
Les
exceptionnelles qualités d'Ayala, agé de vingt-et-un ans seulement et
appelé pour la première fois en sélection par Passarella en novembre
1994, ne passent évidemment pas inaperçues, et le nouveau phénomène
attise la convoitise des plus grosses écuries européennes. Désireux de
traverser l'Atlantique le plus rapidement possible, il répond
favorablement aux avances de Parme dès 1995. Le club ayant déjà atteint
son quota de trois
joueurs extra-communautaires, l'Argentin se voit prêté au Napoli, qui
rachète la moitié de son contrat. Il passera trois saisons à Naples dans
la peau d'un titulaire indiscutable avant d'être transféré au Milan AC
en 1998, où Zaccheroni lui préfère souvent Costacurta ou Luigi Sala.
Les
dirigeants du FC Valence s'offrent l'affaire du siècle lorsqu'ils le
font signer en 2000 pour la somme dérisoire de trois millions d'euros. A
vingt-sept ans et après deux saisons sur le banc du Milan AC, Ayala a
les crocs et a atteint l'âge où les grands défenseurs commencent à
donner leur pleine mesure. S'imposant immédiatement comme un des
tauliers de l'équipe, il enchaîne les prestations impeccables et
contribue grandement à la superbe saison du club, battu en finale de
Champions League par le Bayern aux tirs aux buts après avoir éliminé
Arsenal et Leeds. Sous le maillot de Valence, avec lequel il dispute
près de 300 matches, Ayala est enfin reconnu à sa juste valeur et gagne
sa place parmi les tous meilleurs défenseurs de la planète.
Aux
côtés de Canizares, Carboni, Baraja, Albelda et Joaquin, il remporte
deux fois la Liga au nez et à la barbe des deux géants en 2002 et 2004,
patron d'une défense de fer qui encaisse moins de trente buts en
2001-2002 et 2003-2004. En 2006, le nouveau directeur sportif Amadeo
Carboni refusant de lui offrir un nouveau contrat, Ayala signe à
Saragosse et termine tranquillement sa carrière européenne en deuxième
division espagnole avant de retourner au pays et de tirer définitvement
sa révérence à trente-sept ans sous les couleurs du Racing Club de
Avellanada.
Deuxième
joueur le plus capé de l'histoire de l'Albiceleste derrière Javier
Zanetti avec 115 sélections entre 1994 et 2007 et capitaine régulier de
l'équipe nationale, Ayala a été retenu dans les listes pour trois Coupes
du Monde, assistant impuissant à la débacle de 2002 suite à une
blessure de dernière minute survenue juste avant le premier match. En
2006, il fait partie de la all-star team sélectionnée par la FIFA, en
compagnie de Thuram, Terry, Carvalho et Cannavaro. Comme malheureusement
nombre de grands joueurs argentins
de sa génération, Ayala n'a pas remporté le moindre trophée avec la
sélection, s'inclinant notamment deux fois devant le Brésil en finale de
la Copa America en 2004 au Pérou et en 2007 au Venezuela.
Lors
du match perdu face à la Seleçao à Maracaibo, il a même le malheur de
marquer un but contre son camp qui permet à l'adversaire de tuer le
match après l'ouverture du score de Julio Baptista. C'est sur cette note
amère qu'il décide de mettre un terme à sa longue carrière
internationale, déclarant que son geste infortuné n'avait eu aucune
influence sur sa décision et que le temps était simplement venu.
Regrettablement, même les meilleurs n'ont pas toujours le privilège de
se retirer sur une victoire.
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