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vendredi 27 avril 2012

Edwin Van der Sar, le faux timide

Jusqu'au bout de son immense carrière, à laquelle il mit un terme à quarante berges et des poussières après une défaite en finale européenne contre le Barça en mai 2011, Edwin van der Sar aura eu l'air d'un adolescent dégingandé. A un poste où la coordination est aussi essentielle que derrière une batterie, il donnait le sentiment de ne pas toujours savoir que faire d'un corps trop long et de membres démesurés. En dehors de sa taille, rien a priori n'impressionnait chez le portier hollandais, grande tige que le moindre choc semblait devoir briser.


Mais toutes ces impressions disparaissaient lorsque l'on voyait le bonhomme à l'oeuvre dans ses cages: Van der Sar, capable de réflexes étonnants et doté d'une détente assez impensable pour un joueur de son gabarit, n'hésitait pas à aller se frotter aux attaquants adverses dans les airs. Il se dégageait de ses interventions une autorité et un calme qui avaient le don de rassurer tout son monde. Dans sa surface, Van der Sar le faux timide rentrait dans le costume du patron, et même les plus grands (De Boer, Stam, Thuram, Ferdinand) pouvaient se voir rappelés à l'ordre par le gardien batave, qui exigeait de ses partenaires une attention et une application de tous les instants. Modèle de professionnalisme, il ne prenait aucun match à la légère et abordait toutes les rencontres avec la même intensité et la même rigueur.

La force d'Ewin van der Sar résidait dans sa polyalence, si tant est que le terme puisse s'employer au sujet d'un gardien de but. Si on le compare avec les grands portiers de sa génération (et ils furent nombreux), il n'est pas celui qui frappe le plus l'imagination: Buffon, toujours au sommet, a acquis un statut quasi-légendaire, Casillas possède un palmarès long comme le bras, Kahn a presque gagné une Coupe du Monde à lui tout seul et Barthez a marqué les esprits autant par sa personnalité fantasque que ses parades aberrantes.
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Ils méritent tous le plus grand respect et font à coup sûr partie des meilleurs gardiens de l'histoire du jeu, mais Van der Sar, incarnation de la sobriété et du classicisme absolu, n'avait aucun point faible: sûr dans ses sorties, impressionnant sur sa ligne, lucide et intelligent dans sa lecture du jeu, il possédait en outre un excellent jeu au pied qui lui permettait de jouer les liberos derrière le libero. Régulier comme un métronome et concentré jusqu'au bout des gants, il ne se trouait pour ainsi dire jamais et n'avait pas besoin de s'agiter dans tous les sens ou de porter des tenues aux couleurs criardes pour marquer son territoire. Van der Sar, ce n'était pas le show façon Campos ou Higuita, mais c'était la sécurité tous risques.

     Titulaire dans les buts de l'Ajax dès la saison 1992-93 (il prend alors la relève Stanley Menzo, autre grande figure du club), Van der Sar collectionne les trophées lors de ses années néerlandaises: quatre championnats, trois coupes des Pays-Bas et surtout la Champions League et la Coupe Intercontinentale en 1995. Etrangement, il lui faudra attendre près de dix ans pour ajouter une nouvelle ligne à son palmarès. Sous le maillot de la Juventus, qu'il rejoint en 1999, il finit deuxième du championnat en 2000 et 2001 derrière la Lazio puis la Roma. Poussé vers la sortie par le recrutement de Buffon, Van der Sar signe à Fulham, une destination clairement au rabais pour un joueur de son envergure. Il y restera quatre saisons, jusqu'à ce que Ferguson lui donne à nouveau l'opportunité de jouer dans une équipe taillée pour lui.

A trente-cinq ans, il retrouve une deuxième jeunesse avec Manchester United et prouve à tous les sceptiques qu'il fait toujours partie des meilleurs spécialistes du monde à son poste. Avec les Red Devils, il remporte quatre fois le titre en six ans entre 2005 et 2011 et s'offre une seconde Champions League face à Chelsea en 2008, treize ans après le sacre de Vienne. Battu par Ballack, Belletti, Lampard et Cole lors de la série de tirs aux buts, il parvient finalement à sortir la tentative d'Anelka pour donner la coupe aux grandes oreilles aux siens. Nommé dans l'équipe-type de Premier League en 2011, il ne peut cependant rien face à Messi et compagnie lors de la finale de Wembley. 

En vingt ans de carrière, Van der Sar a multiplié les exploits et les records: il est à ce jour le joueur le plus âgé à avoir gagné le championnat d'Angleterre (40 ans et 205 jours) et à avoir participé une finale de Champions League (40 ans et 211 jours). Il détient également le record d'invincibilité en Premier League (1311 minutes en 2008-2009, soit plus de quatorze matches, avec United) et celui du nombre de sélections en équipe des Pays-Bas (130 entre 1995 et 2008). Il fut élu meilleur gardien européen par l'UEFA à quatre reprises en 1995, 2008, 2009 et 2010. Il a gardé les buts de l'Ajax pendant plus de 200 matches et disputé au total plus de 300 rencontres de Premier League.

Van der Sar a joué deux Coupes du Monde et trois championnats d'Europe avec les Oranje, ne parvenant jamais à se qualifier pour la moindre finale. Comme beaucoup d'anciens de l'Ajax qui remplirent leur vitrine à trophée sous d'autres maillots (Clarence Seedorf, Dennis Bergkamp et Edgar Davids notamment), il manque à Van der Sar un titre international qu'il pourra toujours envier à Barthez, Buffon et Casillas, tous trois couverts d'or en équipe nationale. Outre ce manque cruel, il reste regrettable qu'un des plus grands gardiens de tous les temps ait perdu de précieuses années dans une équipe comme Fulham et qu'aucun grand club n'ait alors fait appel à lui. Parfois, on se demande ce que les dirigeants ont dans le crâne.























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