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lundi 8 juillet 2013

Allemagne 2002: au bout de l'absurde

A l'heure d'attaquer son Mondial 2002, la Mannschaft traverse l'une des plus mauvaises passes de son histoire. Quatre ans plus tôt en France, elle s'était faite littéralement humilier en quart de finale par la Croatie (0-3), un adversaire joueur et sans complexes qui lui avait infligé sa plus lourde défaite en Coupe du Monde depuis 1954. Lors de l'Euro 2000, battue par l'Angleterre et le Portugal, l'Allemagne termine dernière de son groupe avec un petit point arraché à la Roumanie. Enfin, quelques mois avant le rendez-vous asiatique, elle connaît à Munich une défaite historique face au meilleur ennemi anglais (1-5) dans le cadre des éliminatoires.

Logiquement, la Mannschaft, triple championne du monde, ne fait pour une fois pas partie des principaux favoris du tournoi, parmi lesquels se trouvent fréquemment cités la France, l'Argentine et le Brésil et, un cran en-dessous, l'Italie, l'Espagne, l'Angleterre et le Portugal. Elle va pourtant profiter de circonstances très favorables (groupe tranquille, hécatombe ahurissante au premier tour, bienveillance arbitrale vis-à-vis de la Corée du Sud face à l'Italie et l'Espagne) pour se hisser jusqu'en finale, ratant de peu le parfait hold-up.


Lorsqu'on jette un oeil à la liste des joueurs retenus par Rudi Völler, qui comporte son lot de bourrins notoires (Linke, Jancker, Ramelow), de joyeux semelleurs (Jeremies, Hamann) et de noms oubliables made in Bundesliga (Rehmer, Böhme, Kehl, Bode), on ne peut s'empêcher de penser que l'Allemagne version 2002 est peut-être l'équipe la plus faiblarde à avoir jamais disputé une finale mondiale. Le onze teuton se compose de sept éléments moyens et de quatre barons (un par ligne) qui vont faire la différence tout au long du tournoi: Oliver Kahn, au sommet de son art et quasiment infranchissable, Cristoph Metzelder, impeccable patron de défense pour une fois épargné par les blessures, Michael Ballack, en mode meilleur milieu de terrain du monde à l'été 2002, et Miroslav Klose, parfait dans le rôle du buteur opportuniste.


L'Allemagne a la chance de pouvoir faire chauffer le moteur dans un groupe des plus peinards (Arabie Saoudite, Irlande et Roumanie, vous avez dit cadeau?) dont elle termine première, ce qui lui permet d'éviter l'Espagne. Au bout d'un huitième de finale à se pendre, Oliver Neuville finit par trouver la faille dans la défense paraguayenne à la 88ème et envoie son équipe en quart, où elle affronte...les Etats-Unis, l'une des nombreuses surprises d'une compétition qui marche sur la tête. Résultat: 1-0, but de Ballack, rideau et au suivant. En demi-finale, la Mannschaft rencontre un autre adversaire prestigieux, la Corée du Sud. Et que croyez-vous qu'il se passât? 1-0, but de Ballack, rideau et place au Brésil.

Pour atteindre sa septième finale de Coupe du Monde, la sélection allemande s'est promenée dans une poule ridiculement faiblarde avant d'enchaîner trois succès minimaux sur des adversaires plus que limités et pas franchement habitués à jouer les premiers rôles. Dans ces conditions, on se dit alors que la bande de Völler peut aller jusqu'au bout de l'absurde et, sur un malentendu, taper une Seleçao qui n'a rien montré de flamboyant non plus, et ce même sans Ballack, suspendu, lui qui reste sur deux finales perdues et une fin de championnat ratée avec le Bayer Leverkusen.

Aujourd'hui, on se souvient essentiellement de la boulette d'Oliver Kahn, grand moment de cruauté footballistique tant il est vrai que le portier du Bayern avait jusque-là collectionné les parades miraculeuses. On a tendance à oublier qu'à l'heure de jeu, le score était toujours nul et vierge, que le football samba était resté aux vestiaires et qu'on devait toujours serrer méchamment les miches du côté de Rio de Janeiro et Salvador de Bahia. Qui pourra jamais dire ce qui se serait produit si Kahn n'avait pas offert sur un plateau l'ouverture du score à Ronaldo et si Michael le maudit avait pu disputer cette finale?

Quelque part, la victoire finale du Brésil, sans doute accueillie avec soulagement par les gros bonnets de la FIFA, permet de sauver les apparences et de trouver une pseudo-morale à l'histoire (le gentil Ronaldo qui revient de blessure pour empêcher les méchants Allemands de repartir avec le trophée), mais l'Allemagne aurait très bien pu être le vainqueur médiocre d'un tournoi médiocre. Ironiquement, alors qu'il est maintenant entouré en sélection de grands talents qui soignaient encore leur acné en 2002, Miroslav Klose n'est jamais passé aussi près du titre mondial. S'il en est un qui peut témoigner de la révolution culturelle opérée par le football allemand depuis ce qui apparaît comme une autre époque, c'est bien lui.

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