Après ce nouveau résultat
décevant en Géorgie, tout le monde va s'en donner à cœur joie sur
l'inefficacité offensive des Bleus, leur incapacité à mettre du
rythme dans la rencontre, voire, sans nul doute, le manque
d'investissement de certains sous le maillot de la sélection, suivez
mon regard. Pourtant, au-delà de toute considération tactique ou
pseudo-psychologique, nul besoin d'être docteur ès
tableaunoirologie pour dresser un constat aussi simple qu'évident:
le football français manque de ressources et ne compte que trop peu
de joueurs capables de briller au niveau international, même face à
des équipes de niveau modeste. Il suffit de considérer la liste de
Deschamps ligne par ligne pour s'en convaincre.
En défense centrale, mis à part
Varane, personne ne fait réellement l'unanimité, à tel point qu'un
grognard comme Abidal a pu gagner une place de titulaire sur la foi
de quelques bons matches en Ligue 1. Le Monégasque a d'ailleurs signé
un match correct, mais si Paulo Bento rappelait Ricardo Carvalho en sélection,
on se ferait quand même du mouron pour la Seleccao. Sagna et Evra,
aussi incapables de verrouiller leur couloir que de poser un centre
digne de ce nom, continuent à empiler les sélections et les
prestations insipides, faute de concurrence: Debuchy touche le fond
avec Newcastle, Reveillère a plié les gaules et Digne cire le banc
du PSG.
Au milieu, les absences conjuguées
de Cabaye, Pogba et Matuidi constituaient certes un handicap, mais il
ne faut pas perdre de vue que le premier joue dans une équipe
faiblarde, que le second, aussi talentueux soit-il, ne compte que
deux sélections, et que le troisième n'a qu'une seule saison
véritablement probante derrière lui. Les membres de ce trio restent
encore loin des références mondiales de l'entrejeu mais n'en
possèdent pas moins une marge considérable sur leurs rivaux
potentiels. Le fait que Deschamps, quoi que l'on pense de ce choix,
en soit réduit à convoquer Sissoko, Kondogbia et Guilavogui pour
une rencontre de cette importance en dit long sur le réservoir à sa
disposition.
Les entrées en jeu des deux
bannis de longue date Gignac et Nasri, censés sauver la patrie en
danger, prêteraient presque à sourire si le football français ne se
trouvait pas dans une telle panade. Orphelins d'un Benzema à la
confiance en berne, les Bleus ne peuvent compter sur aucun buteur de
classe mondiale. Giroud, pourtant auteur d'un excellent début de
saison avec Arsenal, appartient à la catégorie des bons attaquants
de club qui peuvent rendre des services en sélection sans jamais
devenir indiscutables, au même titre que les Cissé, Gomis ou Saha
par le passé. Malgré sa carrure et son indéniable talent, il
semble que le costard de buteur en chef de l'équipe de France soit
un peu trop grand pour lui.
Il ne s'agit pas ici de tirer sur l'ambulance au bazooka façon Larqué, de jouer les déclinologues de service et d'affirmer péremptoirement que la France a disparu de la liste des nations qui comptent. Sans vouloir donner dans l'alarmisme, on ne peut que constater que, dès que blessures et suspensions viennent bousculer le semblant de hiérarchie établie, trouver onze types capables de former une équipe compétitive relève du casse-tête. Alors qu'une convocation chez les Bleus devrait récompenser l'excellence, on a désormais le sentiment que n'importe quel tâcheron qui aligne trois matches potables peut rêver de Clairefontaine (le précédent Amalfitano), ce qui ne contribue pas exactement à créer l'émulation au sein du groupe.Ce manque flagrant de "moyens humains" limite forcément les choix mais ne saurait totalement dédouaner le sélectionneur de toute responsabilité: après tout, son travail consiste aussi à tirer le meilleur de ses troupes qui, même amoindries et dans le doute, auraient dû s'imposer en Géorgie. Les options prises par Deschamps (associer deux attaquants à la complémentarité peu évidente, confier les côtés à des latéraux qui n'aident pas à contourner le bloc adverse et surtout planter un tronc d'arbre comme Guilavogui au milieu plutôt que d'aligner un créateur supplémentaire) ont pesé dans la balance. Après treize matches, Deschamps présente un bilan catastrophique mais bénéficie toujours d'une forme d'immunité, puisqu'il semble que la fédération soit disposée à lui proposer une prolongation de contrat même en cas d'élimination. Nul doute que Laurent Blanc appréciera.

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