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mardi 27 octobre 2015

Chelsea dans l'impasse

Personne n'aurait pu imaginer pareil début de saison pour les champions d'Angleterre en titre, qui ont déjà subi cinq revers en dix journées, soit déjà deux de plus que sur l'ensemble de l'exercice 2014-2015. Le titre est sans aucun doute déjà perdu, et Chelsea va devoir cravacher sévère pour accrocher la quatrième place qu'occupe United avec neuf points d'avance sur les Blues. Les joueurs de Mourinho ont laissé s'échapper un trio majeur constitué de City, Arsenal et United, entre qui se jouera le sacre, et ne peuvent désormais espérer que finir devant Tottenham pour arracher un strapontin pour la Champions League.


L'ampleur du désastre dépasse le strict plan comptable: les leaders sont en perdition, Hazard enchaîne les prestations quelconques et Mourinho devient chaque jour un peu plus une caricature de lui-même. Disons-le tout net, nous n'avions pas pris autant de plaisir à voir une équipe sombrer corps et biens depuis la déroute du Brésil contre l'Allemagne. Schadenfreude, ne manquerez-vous pas de rétorquer avec une maîtrise de la langue de Goethe et Klinsmann qui vous honore, mais est-ce vraiment une joie malsaine que de se réjouir des malheurs de Mourinho?

Même les fans les plus pessimistes n'auraient pas mis Chelsea derrière Watford et Stoke City après dix matches, mais peut-être n'a-t-on pas assez accordé d'importance à certains signes avant-coureurs, qu'il est certes aisé de voir comme tels aujourd'hui. L'élimination par le PSG malgré la supériorité numérique au retour avait laissé entrevoir des failles. Un Chelsea pragmatique et bien moche à souhait (le vrai Chelsea en somme) n'aurait pas laissé filer la qualification, surtout sur un coup de pied arrêté.

En Premier League, les Blues avait terminé la saison assez péniblement, s'appuyant sur un Eden Hazard décisif et gérant avant tout l'avance acquise au cours d'une première moitié de championnat irrésistible. Le jeu de l'équipe avait eu tendance à se déliter, notamment à cause de la baisse de régime du duo Fabregas-Costa, qui avait grandement contribué à installer les Blues en tête.


On peine à croire qu'il s'agisse d'un problème de motivation et que l'effectif se soit endormi sur ses lauriers. Mis à part Terry, Cahill, Ivanovic et Ramires, vainqueurs de la CL en 2012, et les deux Espagnols Fabregas et Pedro, gavés de titres avec l'Espagne et le Barça, la plupart des joueurs majeurs (Azpilicueta, Matic, Costa, Oscar, Hazard, Willian) ont encore un palmarès à construire.

On entend aussi dire que le groupe est vieillissant, mais parmi les titulaires réguliers, seuls Terry et Ivanovic ont plus de trente ans. Le calendrier? Chelsea a certes perdu contre City, mais aussi contre Crystal Palace, Southampton, West Ham et Everton. Même à Stamford Bridge, les Blues ne font plus peur et se font allègrement rentrer dedans par des adversaires sans complexes, quand Costa ne distribue pas les mandales avec la bénédiction de son coach, plus que jamais en course pour le prix du fair play.

Mourinho a forcément une part de responsabilité. Tout le monde lui passe la brosse à reluire quand il accumule les victoires avec cynisme et arrogance, alors ne nous gênons pas pour le tailler comme il se doit maintenant que ses méthodes ne débouchent plus sur les mêmes résultats. Comment expliquer que son équipe semble rincée et totalement à court d'idées comme si elle avait cinquante matches dans les jambes? Qu'elle ne sache tout simplement pas quoi faire du ballon en phase offensive? Que son milieu et sa défense prennent l'eau face à des équipes moyennes? Que des joueurs essentiels la saison dernière (on pense essentiellement à Matic, Costa, Hazard et Fabregas) se traînent littéralement à des années lumière de leur meilleur niveau? Si le PSG cumulait autant de problèmes, nul doute que Blanc en prendrait plein la tronche pour pas un rond et serait tenu pour le principal responsable.


La gestion du cas Hazard est catastrophique. Voilà un joueur élu meilleur joueur du championnat il y a quelques mois, qui a tenu la baraque une bonne partie de la saison dernière et qui semble désormais proche d'un départ. A force de miser sur la stratégie du good cop/bad cop (une fois Hazard est meilleur que Ronaldo, une fois il n'est pas assez bon pour être dans le onze), Mourinho a peut-être trop tiré sur la corde.

Quand ils sont dans la difficulté, comme c'est le cas de Hazard en ce moment, certains joueurs ont besoin qu'on leur témoigne encore plus de confiance aussi bien en interne que publiquement. Sortir Hazard de l'équipe en expliquant qu'il obligeait ses milieux à trop souvent déserter l'axe pour couvrir les côtés relève quasiment de l'aberration. Pour Mourinho, il faut avant tout qu'un attaquant sache défendre, et son idée du joueur idéal s'approche plus de Ramires que de Riquelme. Nul doute que son équipe se porterait mieux si Hazard faisait ses valises.

Causons un brin des joueurs que Mourinho a laissé partir pour diverses raisons: Kevin De Bruyne (qui ne s'entraînait pas bien), meilleur joueur de Bundesliga 2014-2015, Mohamed Salah, auteur de 11 buts en 25 matches depuis son arrivée en Italie, Romeo Lukaku, il est vrai infiniment inférieur à Falcao, ou encore Felipe Luis, reparti à l'Atletico. En revanche, le Mou a fait signer un gros chèque à ses dirigeants pour Juan Cuadrado, l'homme qui se dribble tout seul, et venir l'indispensable Papy Djilbodji, un choix longuement mûri qui devrait redonner une assise à sa défense,. Un type comme Oscar, souvent transparent et nettement surcoté, a rarement été remis en cause, et il a fallu qu'Ivanovic organise une énième opération portes ouvertes sur son côté pour que son entraîneur se décide à le mettre sur le banc.


La situation devient carrément comique, car le seul maître à bord est aussi celui qui est train de conduire le navire au naufrage. Mourinho jouit d'un tel statut à Chelsea que personne ne va jamais venir lui taper sur l'épaule pour lui dire qu'il déconne plein pot et ferait bien de changer de cap. Plus dictatorial que jamais, il écrasera dans l’œuf tout début de révolte de ses cadres et accueillera les critiques avec un haussement d'épaules. Abramovich tient le lare-feuilles, mais on le voit mal taper sur les doigts de son coach.

Chelsea a remporté un titre en faisant revenir Mourinho mais le club pourrait bien payer très cher cette décision sur le long terme. Partout où il est passé, le Portugais a pratiqué la politique de la terre brûlée, allant au bout de ses idées jusqu'à l'absurde, se mettant dirigeants et médias à dos systématiquement, laissant derrière lui des vestiaires à feu et à sang (demandez à Casillas ce qu'il pense de son passage au Real). On savait qu'après quelques cycles courts à droite et à gauche, il reviendrait s'installer dans son fauteuil à Chelsea. Tout le monde l'attendait comme le messie à Stamford Bridge. Désormais, il va falloir faire avec.

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