Nous vivons dans un pays où des joueurs exceptionnels comme Cantona et Ginola ont été traités comme de véritables parias parce qu'ils avaient trop de talent et de caractère et où de bons petits soldats anonymes comme Diomède et Guivarc'h ont été sacrés champions du monde. Nous vivons dans un pays dont la fédération de football a reconduit Domenech après le désastre industriel de l'Euro 2008 pour connaître la honte internationale de Knysna deux ans plus tard. Nous vivons dans un pays qui ne cesse de critiquer les choix d'un entraîneur comme Luis Enrique pour la seule raison qu'il méprise superbement la caste journalistique française (et comment lui donner tort lorsqu'on considère la médiocrité affligeante des médias nationaux?) et où Jean-Louis Gasset est encensé après trois victoires contre des équipes aussi terrifiantes que Nantes, Clermont et Montpellier. Et surtout, nous vivons dans un pays où il est strictement interdit de critiquer Didier Deschamps, qui semble protégé par un totem d'immunité totale et faire l'objet d'un consensus tacite. Deschamps, dans l'inconscient collectif, c'est le capitaine de l'OM sacrée à Munich ("à jamais les premiers", comme disent les Marseillais pour se consoler de leur déclassement et de l'hégémonie parisienne), l'homme qui a soulevé la Coupe du Monde en 1998, le sélectionneur vainqueur en Russie et finaliste au Qatar. On loue ses capacités de meneur d'hommes, son leadership naturel, sa capacité à tirer le meilleur d'un effectif pas toujours exceptionnel, son aura auprès des joueurs. Mais jamais on ne critique son choix ou son absence de choix, ses options tactiques douteuses, sa frilosité, son conservatisme, son sécuritarisme maladif, son refus total de se remettre en cause comme après l'échec de l'Euro 2021 et l'élimination face à la Suisse. Jamais l'on entend le moindre reproche à son égard, la moindre remise en question, le moindre son de cloche dissonant. Diallo a déjà annoncé qu'il serait reconduit dans ses fonctions après l'Euro quelque soit l'issue de la compétition. Et disons-le tout net, quatorze ans de Deschamps, c'est trop.
On a tout entendu après la défaite indiscutable contre l'Allemagne: que les joueurs s'étaient économisés en vue des échéances à venir, que l'absence de Griezmann avait pesé lourd (un seul être vous manque et tout serait dépeuplé?), que les matches amicaux ne constituaient pas forcément une source de motivation suffisante (comme si la perspective de rencontrer l'Allemagne ne représentait pas en soi un défi footballistique) et que même le ramadan pratiqué par certains joueurs pouvait expliquer la baisse de régime collective. A-t-on entendu que le principal responsable de ce revers pouvait se nommer Didier Deschamps? Non. Et pourtant il y aurait beaucoup à dire sur le onze aligné par le sélectionneur, qui inexplicablement s'est privé des deux spécialistes du poste Jonathan Clauss et Théo Hernandez pour titulariser quatre défenseurs centraux, dont Jules Koundé, dont on se demande toujours ce qu'il peut bien lui trouver et qui aurait certainement plus sa place à la fashion week qu'en sélection. Résultat: aucun débordement des latéraux, aucun dédoublement dans le dos de Mbappé et d'un Dembélé qui a fait ce qu'il a pu, aucune combinaison sur les côtés. Les binômes Théo-Mbappé et Clauss-Dembélé avaient jusque là donné satisfaction mais le sélectionneur a choisi de les sacrifier sans aucune raison valable. Pour tester une énième fois un Koundé affligeant techniquement et incapable de réussir un centre en latéral droit? Pour se convaincre définitivement que Lucas Hernandez était meilleur dans l'axe? Et malgré ce sécuritarisme affligeant, la défense des Bleus s'est montré d'une porosité effrayante, encaissant un but après sept secondes et se faisant allègrement transpercer à chaque offensive allemande. Sans un solide Samba dans les cages, la note aurait été bien plus salée.
Que dire des choix aberrants du sélectionneur dans le secteur du milieu? En l'absence de Griezmann, il avait choisi de rappeler Guendouzi, comme si il avait de facto renoncé à remplacer numériquement son meneur de jeu. Il n'a pas non plus renoncé à son 4-3-3, qui n'a plus aucune raison d'être sans le Français de l'Atletico Madrid. Parmi le trio Rabiot-WZE-Tchouameni, qui était censé occuper la fonction de premier relanceur? Qui devait se charger de faire le lien entre le milieu et l'attaque? En alignant trois récupérateurs alors que, comble d'ironie, la possession fut très largement allemande, on a l'impression que DD s'est contenté d'aligner un bloc défensif, un bloc médian et un bloc offensif sans se soucier une demi-seconde de la connexion entre les trois, ce qui devrait pourtant être la base de son travail. Pavard et Upamecano brillent-ils par leur qualité de relance? La réponse est non. Rabiot, WZE et "l'empereur du milieu" selon le reportage comique de TF1 sont-ils capables de diriger la manœuvre avec la même maestria qu'un Toni Kroos? La réponse est non. Sont-ils en mesure d'approvisionner leurs attaquants en bons ballons? La réponse est non. Sont-ils en mesure d'apporter de la verticalité au jeu et de transpercer le bloc adverse? La réponse est encore non. Et qui entre en cours de jeu? Fofana et Camavinga, deux autres éminents joueurs de ballon. Il y avait quelque chose à tenter pour tenter de remplacer Griezmann et oser quelque chose de différent à l'occasion d'un match amical, qui doit être l'oaccsion de tester de nouvelles solutions. Mais le sélectionneur a fait le choix de ne rien changer. Qu'on ne s'étonne pas alors de la pauvreté du jeu proposé par les Bleus, dont le premier responsable se nomme Didier Deschamps, qui semble totalement perdu sans son Griezou chéri.
Question à dix mille dollars (envoyez vos réponses à LPC International Media Group): où sont les techniciens dans ce qui devrait un tant soit peu ressembler à une équipe de football? Où sont les équivalents français des deux joyaux Musiala et Wirtz, des virtuoses du milieu Gündogan et Kroos, de l'inusable Thomas Müller? Nagelsmann a fait le choix de la maîtrise et de la possession et posé une équation insoluble à son homologue français, qui n'avait à lui opposer que du muscle et du kilométrage. Là encore, la responsabilité incombe à Deschamps, qui à force de sélectionner de sinistres bourrins type Sissoko ou Tchouaméni et à strictement éliminer les profils plus techniques a complètement tué le poste de milieu offensif en France. Qui sont les héritiers de Platini, Zidane, Micoud, Carrière, Martins, Benarbia, voire Gourvennec? A croire que ça le dérange, le DD, qui en tant que joueur n'était qu'un modeste porteur d'eau, les joueurs plutôt doués avec la chique balle au pied. Autre question à dix mille dollars (envoyez toujours vos réponses à LPC Media Group International ou envoyez DD Démission au 00007): que se passera-t-il quand Griezmann, âgé de trentre-trois piges, prendra sa retraite internationale? Devra-t-on se contenter de ce manque total d'ambition dans le jeu, de cette infâme bouillie tactique et ce néant abyssal dans l'animation? Qu'adviendra-t-il quand Giroud quittera définitivement le navire? Peut-on raisonnablement penser que deux éléments aussi limités que Thuram et Kolo Muani représentent l'avenir de la sélection en attaque? Mbappé ne peut pas être à la fois l'alpha et l'omega et la réponse à tous les problèmes. Sans un milieu un tant soit peu plus joueur et de vrais latéraux à leur poste, l'histoire allemande se répètera. Parfois, on se croirait revenu aux heures les plus sombres de l'ère Domenech, et ce sentiment funeste ne trouve son origine que chez un seul homme: Didier Deschamps.
En même temps je me demande quel joueur pourrait remplacer Griezmann à ce poste. Quel manieur de ballon est au niveau international ? On parle de Griezmann mais on oublie aussi Pogba qui dans ses meilleurs moments était capable de faire basculer une rencontre.
RépondreSupprimerJe vois pas la relève au milieu. Pas de vrai technicien.
Est-ce la faute de Deschamps s'il ne peut pas sélectionner de milieu créateur de haut niveau ? Je ne suis pas fan du jeu de l'équipe de France en tant qu'amoureux du football mais je suis bien content qu'ils performent à quasiment chaque compétition depuis 10ans.
RépondreSupprimerSi on avait des profils créatifs de haut niveau, il les prendrait. Le problème se trouve sûrement dans notre formation.
Je trouve que DD fait très bien avec ce qu'il a ! Tu parles de remise en question mais après l'échec de l'euro 2021, il a rappelé Benzema...