Le moins que l'on puisse
dire, c'est que Gervinho ne laissera pas un souvenir impérissable
aux fans des Gunners. Maladroit, peu inspiré et souvent à côté de
ses pompes, l'Ivoirien a traversé la saison dernière comme une
ombre, suscitant l'agacement et l'interrogation. Outre-Manche, nombre
de footophiles et d'experts se sont sans doute demandé comment le
père Arsène, pourtant pas du genre à mettre facilement la main au
morlingue, avait pu claquer la bagatelle de quinze millions pour ce
rasta dégingandé et nonchalant. Le bilan de l'ancien Manceau sous
le maillot d'Arsenal en dit plus long que tous les adjectifs: 9 buts
et 6 passes décisives en 46 matches de Premier League. Une misère
pour un joueur de sa classe.
Pourtant, si Wenger s'est
parfois royalement planté avec des produits made in Ligue 1, on peut
difficilement lui reprocher d'avoir mis le paquet pour recruter
Gervinho, qui fut peut-être tout simplement le meilleur joueur du
championnat de France 2010-2011 avec son coéquipier Hazard. Avant
son éclosion au plus haut niveau avec le LOSC, on le savait pétri
de talent et doté d'un pouvoir d'accélération et d'une faculté
d'élimination peu communes. A Lille, il sut gagner en constance pour
devenir plus qu'un joueur de coups d'éclat et se montrer
régulièrement décisif tout en s'intégrant parfaitement au
collectif nordiste (28 pions et 15 caviars entre 2009 et 2011).
Arsenal semblait un choix logique dans son évolution de carrière,
mais on connaît la fin de l'histoire.
Pourquoi Gervinho
n'a-t-il pas réussi à percer en Premier League, au point qu'Arsenal
n'ait pas souhaité insister et l'ait laissé partir au bout de deux
ans? Difficile à dire. Peut-être n'a-t-il pas supporté la rudesse
des duels et des contacts d'un championnat anglais qui à vrai dire
ne fait pas vraiment la part belle aux ailiers virevoltants. D'un
point de vue tactique, avec des éléments comme Cazorla, Giroud,
Wilshere, Ramsey, Rosicky ou Arteta (et maintenant Özil), il est
évident qu'Arsenal cherche plus à combiner dans l'axe et au cœur
des défenses adverses qu'à miser sur la vitesse et les centres de
ses joueurs de couloir. Gervinho se sentait parfaitement à son aise
au sein du 4-3-3 lillois mais n'a semble-t-il jamais compris ce que
Wenger attendait vraiment de lui.
Gervinho a fait coup
double en retrouvant son mentor et signant pour un club ambitieux et
désireux de repartir sur des bases nouvelles. Déjà auteur de trois
réalisations en six journées (soit presque autant que son total de
la saison dernière), l'Ivoirien, à nouveau spectaculaire et
efficace, incarne le début de saison parfait d'une Roma euphorique
qui n'a pas encore laissé le moindre point en route. Sa chevauchée
face à Bologne a marqué les esprits et démontré que, lorsqu'il se
sentait en confiance, il pouvait encore faire passer les défenseurs
adverses pour des plots d'entraînement et créer d'énormes
différences balle au pied. Ce Gervinho giallorosso rappelle celui,
créatif et imprévisible, des plus belles heures lilloises. A 26
ans, une seconde carrière italienne s'offre à lui, et il n'aurait
pu espérer de meilleures conditions pour rebondir. Même si les
semaines et mois à venir s'avéraient moins prolifiques, ce qui ne
constitue en rien une fatalité, il peut s'estimer heureux de son
sort. Après tout, il n'est peut-être pas passé loin de finir en
prêt à West Ham.
C'est pas Jean-Louis, c'est Rudy.
RépondreSupprimer