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mardi 23 avril 2024

La Premier League est-elle toujours le meilleur championnat au monde?

On entend souvent dire que la Premier League serait le meilleur championnat de la planète. De par son histoire (après tout, le football a bien été inventé et codifié en Angleterre), son prestige et les vedettes qui l’animent, le championnat anglais est devenu une sorte de cirque géant mondialisé, un immense show médiatique, un Barnum du football que toutes les télévisions du monde s’arrachent à prix d’or (il est révélateur qu’une chaîne comme Canal Plus diffuse désormais davantage de rencontres de Premier League que de matches de Ligue 1). Longtemps confinée à une affaire d’Anglais entre eux (les Zola, Vialli, Cantona et Ginola étaient des pionniers outre-Manche dans les années 90), la Premier League s’est au fil du temps muée en une sorte d’Eldorado pour tout joueur de classe mondiale, et ses joutes entre cadors du ballon rond passionnent la planète. Les droits TV colossaux dont bénéficient ses pensionnaires ainsi que l’apparition de capitaux étrangers confèrent aux clubs anglais une puissance financière unique que seuls sont en mesure de concurrencer les très gros budgets du football européen. Ainsi, n’a-t-on pas vu Chelsea, actuellement neuvième du classement et qui ne remportera aucun titre cette saison, claquer des centaines de millions en transferts sur des joueurs comme Mudryk ou Caicedo ? United, en grande difficulté depuis plusieurs années, s’est montré très actif sur le marché des transferts en recrutant Bruno Fernandes, Maguire, Eriksen, Antony ou Höjlund. City a pu s’offir les prometteurs Doku et Gvardiol pour la modique somme de 150 millions d’euros, tandis que Liverpool s’est adjoint les services de Darwin Nunez pour 100 millions en 2022. Toutes les conditions sont réunies pour offrir un spectacle haut de gamme, d’autant que l’Angleterre a su attirer quelques-uns des plus grands techniciens de la planète comme Guardiola, Klopp, Emery ou De Zerbi. Pour autant, la Premier League reste-t-elle le meilleur championnat actuel ?



Si l’on se fie aux récents résultats en Coupe d’Europe, la réponse est clairement non, et à ce titre, la double confrontation entre City, champion en titre, et le Real, s’est avérée révélatrice. En tombant dans une caricature de lui-même, City s’est cassé les dents sur un Real ultra-réaliste et chanceux, comme à son habitude (deux buts sur des frappes contrées à l’aller, un pion sur l’unique occasion au retour avec une frappe de Rodrygo renvoyée directement par Ederson sur l’attaquant brésilien). Parfois brillants à Bernabeu, les hommes de Guardiola n’ont fait que multiplier les passes jusqu’à la nausée à l’Etihad, ne tentant jamais la moindre frappe hors de la surface et échouant à trouver dans de bonnes conditions un Haaland totalement invisible et démuni sur attaque placée. Affligeant de manque d’ambition et vicelard à souhait à l’image d’un Carvajal détestable et dans tous les mauvais coups, le Real s’est contenté de garer le bus devant la cage de Lunin une fois l’ouverture du score acquise, et cela a suffi pour mettre City face à ses faiblesses et carences, à savoir essentiellement une inefficacité chronique face à des blocs resserrés. Malgré les éclairs de De Bruyne, les fulgurances trop rares de Foden, les passes en retrait de cinq mètres de Grealish et les timides tentaitves d’un Bernardo Silva timoré, les Citizens n’ont pas réussi à faire sauter le verrou madrilène et dès lors, lorsqu’on connaît la réussite madrilène en Champions League, la messe était dite. La saison dernière, les Skyblues avaient humilié les boys d’Ancelotti, et il est clair qu’ils ne se situent pas au même niveau cette année. Ce City version 2024 ne vaut pas celui de 2023, mais est-il pour autant inférieur au Real ? Peut-être pas, mais le voilà sorti de la compétition, comme on pouvait malheureusement s’y attendre (nous ne dissimulerons pas notre anti-madridisme primaire et notre détestation d’un club qui ressemble furieusement à une malédiction annuelle).



Clairement favori face à un Bayern largué en Bundesliga, Arsenal a échoué dans sa mission de rallier les demi-finales. Très naïve au match aller et prise en contre par la vitesse d’un Sané intenable, l’équipe d’Arteta n’a pas existé à l’Allianz Arena, ne se créant pas la moindre petite occasion. Son milieu a été bouffé par Goretzka et son attaque annihilée par une charnière centrale bavaroise pourtant faiblarde sur le papier. Organisé en 4-5-1 avec Mazraoui et Kimmich en latéraux derrière la paire Sané-Guerreiro et avec Musiala, Laimer et Goretzka dans l’axe de l’entre-jeu au soutien de Kane, le Bayern a parfaitement contrôlé la fougue offensive des Gunners, meilleure attaque de Premier League, maîtrisant Saka, limitant l’influence d’Odegaard et réduisant Havertz au silence, ce qui il est vrai n’est pas très difficile (nous avons nos têtes de turc à LPC et l’Allemand en fait clairement partie). Comment ne pas parler de fiasco lorsque l’on prétend jouer le titre en Angleterre, que l’on se présente avec la meilleure attaque et défense du Royaume face à un Bayern largement détrôné par Leverkusen, qui a trouvé le moyen de s’incliner face à Sarrebruck, Bochum et Heidenheim et a éprouvé toutes les peines du monde à éliminer la Lazio ? Les Bavarois n’avaient plus atteint le dernier carré de la compétition depuis 2020 et le sacre face au PSG, et on pouvait légitimement penser qu’ils allaient se faire sortir par Arsenal, un adversaire qui toutefois leur avait plutôt bien réussi par le passé. Avec l’élimination de City, il s’agit d’un autre camouflet pour la Premier League, qui n’a plus un représentant en course dans la grande Coupe d’Europe.



Et que dire de Liverpool ? Trop confiant sans doute, Klopp, qui n’a jamais gagné la Ligue Europa, a allègrement fait jouer les coiffeurs à Anfield contre l’Atalanta (pas de Robertson, d’Alexander-Arnold, de Szoboszlai, de Nunez, de Diaz ou de Salah au coup d’envoi) et pris une rouste à la maison, ouvrant par là-même une voie royale pour l’OM jusqu’à la finale. Si le technicien allemand n’avait pas pris ce match par-dessus la jambe, les Reds, vainqueurs à Bergame, se seraient sans doute qualifiés et nous ne serions pas en train de serrer méchamment les fesses en priant pour que les Italiens fassent le boulot contre Marseille (in Gasperini and Scamacca we trust, et heureusement il reste encore une AS Roma talentueuse et un Leverkusen invaincu pour barrer la route à l’OM au cas où en finale). Comme Arsenal, Liverpool finira sur le podium de Premier League, et voir un membre régulier du big four se faire piteusement sortir par le sixième de Serie A fait sérieusement mauvais genre, d’autant que les joueurs de Klopp demeuraient invaincus à domicile depuis 33 matches. Et le pire dans l’histoire, c’est que Klopp a pleinement assumé d’avoir fait tourner face à l’Atalanta pour mieux préparer le match contre Crystal Palace en championnat, match finalement perdu par les siens à Anfield et qui a sévèrement plombé ses chances de titre dans le sprint final. On peut se demander pourquoi le coach des Reds a sciemment balancé la Ligue Europa à la benne, alors que ses joueurs ne devraient remporter aucun trophée cette saison si ce n’est une malheureuse Carabao Cup.



Les résultats des autres équipes anglaises engagées en Coupe d’Europe ne sont guère plus brillants. Logiquement, West Ham s’est fait éliminer par un invincible Bayer Leverkusen, espérons-le et prions le seigneur futur vainqueur de la compétition (ceci dit si la Roma en colle trois à l’OM en finale nous ne viendrons pas pleurer). Comme toujours, les hommes de Xabi Alonso ont fait la différence en fin de match à l’aller par Hofmann et Boniface avant d’égaliser dans les dernières minutes par Frimpong à Londres. Aston Villa, actuel quatrième de Premier League, a souffert mille morts pour sortir le LOSC en Ligue Europa Conférence, ne devant sa qualification qu’aux exploits de son inénarrable gardien Emiliano Martinez, bourreau de la France en finale de Coupe du Monde. Si l’on ajoute à ce sombre tableau que United et Newcastle ont fini derniers de leur groupe en phase préliminaire de Champions League et ont donc dit adieu à l’Europe dès le mois de décembre et que Brighton s’est fait surclasser par la Roma en Ligue Europa, on peut dire que les temps sont durs pour les clubs de Premier League et que le déclassement guette sérieusement. Parmi les dix premiers du classement anglais, seul Aston Villa reste en lice dans la plus modeste des épreuves européennes, sachant que Chelsea et Tottenham jouent seulement sur la scène domestique cette saison. Le bilan est bien maigre pour un championnat que l’on qualifie souvent de plus compétitif du monde, mais on peut assurément encore compter sur Canal Plus pour nous vendre joliment le produit.

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