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mardi 18 juin 2024

Une victoire et des questions

Gagner sans marquer de but, c'est sans doute cela le style Deschamps. Au terme d'un match rugueux, tendu et engagé qui n'aura pas épargné les organismes et n'avait rien d'une mise en jambes, les Bleus se sont imposés sur la plus petite des marges et dans la douleur grâce à un but contre son camp de Wöber consécutif à un débordement de Mbappé. Physiquement au point et préparés au combat, ils ont parfaitement répondu au défi physique imposé par des Autrichiens souvent à la limite de l'acceptable, à l'image de cette poussette de Wöber, déjà averti, sur Griezmann, qui est allé percuter les panneaux publicitaires et s'est ouvert le cuir chevelu. On savait pertinemment qu'en dehors d'un pressing féroce, que les hommes de Deschamps ont su déjouer par des sorties de balle propres, des duels aériens sur coups de pied arrêtés et une intensité de tous les instants, les Autrichiens n'auraient pas grand-chose à proposer, et Maignan, irréprochable, n'a jamais été mis véritablement en danger, si ce n'est sur cette occasion de Baumgartner suite à une remise subtile de Sabitzer à la 36ème minute qui aurait pu changer le cours de la rencontre. Comme toujours sous l'ère Deschamps, la France a remporté son premier match lors d'un tournoi international (6 victoires en autant de rencontres, la centième du sélectionneur en 154 matches) mais comme souvent, elle a vaincu sans véritablement convaincre dans le jeu et son expression collective, s'appuyant avant tout sur des valeurs de solidarité, de rigueur tactique et de respect strict des consignes. Si l'équipe de France à la sauce DD ne sera jamais du goût des esthètes (dont nous sommes), il faut reconnaître qu'elle s'avère toujours très difficile à battre.

 

La grande satisfaction du match provient du secteur du milieu de terrain, où l'inépuisable et bluffant Ngolo Kanté a couvert un terrain absolument gigantesque (on peut raisonnablement se demander s'il ne dispose pas d'un poumon supplémentaire), récupéré un nombre impressionnant de ballons et parfaitement géré quelques situations chaudes, à l'image de ce retour salvateur sur Wimmer en fin de rencontre. Le milieu défensif de poche a justifié de la confiance témoignée par son sélectionneur et répondu de la plus belle des manières à ceux qui doutaient de son niveau et remettaient en cause sa capacité à briller dans une compétition aussi exigeante qu'un Euro après une saison passée au soleil d'Arabie Saoudite. L'ancien joueur de Chelsea a été parfaitement secondé dans sa tâche par un excellent Adrien Rabiot, au profil plus polyvalent et complet plus proche de celui d'un milieu relayeur, qui a dissipé les incertitudes qui pesaient sur sa condition physique après un mois sans jouer et a rayonné dans l'entre-jeu, particulièrement en première période. Toujours juste et précis dans ses transmissions et très utile dans son placement pour venir boucher le côté gauche, le capitaine de la Juventus aurait pu offrir une passe décisive à Mbappé si ce dernier n'avait pas manqué son duel seul face à Pentz. Nous serons nettement plus réservés sur le cas Griezmann, beaucoup moins actif qu'au Qatar, peu influent dans le jeu et imprécis sur ses frappes arrêtées.

 

A l'issue du match au cours duquel les attaquants français n'ont pas réussi à trouver la faille, une question de taille se pose désormais: comment diable jouer sans Mbappé, qui s'est fracturé le nez dans un duel aérien avec Danso et semble d'ores et déjà devoir déclarer forfait pour la rencontre face aux Pays-Bas? Comme on pouvait le prévoir, Thuram, deuxième latéral gauche et meilleur défensivement qu'offensivement, ne représente ni le présent ni l'avenir de la sélection au poste d'avant-centre mais comme on le sait également, Deschamps préfère les attaquants qui savent défendre à ceux qui savent marquer. Même s'il a beaucoup provoqué balle au pied et forcé ses adversaires directs à commettre des fautes, Dembélé, dont on attend le match référence en bleu, a raté à peu près tout ce qu'il a tenté, accumulant comme trop souvent les mauvais choix et les approximations techniques. On peut avoir la nette impression que l'ailier du PSG, qui connaît trop de déchet et cadre environ une frappe sur dix, bénéficie de beaucoup d'indulgence et doit lui aussi sa place de titulaire à son scrupuleux replacement défensif. Le problème réside dans le fait qu'à force de considérer ses attaquants avant tout comme un premier rempart défensif et non comme une menace pour l'arrière-garde adverse, Deschamps a fait de son onze un bloc certes compact et difficile à manœuvrer mais totalement inopérant sur le plan offensif. Nous autres à LPC n'avons toujours pas compris pourquoi le sélectionneur n'avait pas convoqué Lacazette, qui en aurait peut-être mis au moins une au fond hier soir, et il va falloir affronter les Pays-Bas avec un secteur offensif qui ne totalise pas plus de 19 buts en sélection, si l'on exclut le vétéran Giroud.

 

Pour le reste, force est de constater que Koundé, auteur d'un match plus que correct, commence à s'acclimater à son rôle de latéral droit, même s'il reste cantonné aux pures tâches défensives, contrairement à Hernandez, qui a multiplié les appels, les montées et les centres sur son flanc gauche et affiché une belle santé. Saliba, probablement le meilleur défenseur central français actuel et auteur d'une saison de premier plan avec Arsenal, a fait preuve d'une grande sérénité et coupé plusieurs centres dangereux avec à-propos aux côtés d'un Upamecano globalement rassurant mais très perfectible dans la relance. Nous aimerions pour finir avoir un mot de compassion et d'empathie pour "nos amis belges" (l'expression est tellement éculée que nous hésitons à l'employer), très malheureux face à la Slovaquie, qui a ouvert le score sur une grossière erreur de Doku. Invaincu depuis sa prise de fonctions, Tedesco a connu sa première défaite à la tête des Diables Rouges au pire moment et a commis quelques erreurs tactiques, comme celle de placer Carrasco au poste de latéral gauche ou d'avoir inversé les positions de Doku et Trossard. Particulièrement en déveine, les partenaires de De Bruyne se sont vus refuser deux buts (l'un pour un hors-jeu de Lukaku, l'autre pour une main d'Openda) et la tentative de près de Bakayoko a été repoussée sur sa ligne par un défenseur slovaque. Malgré une escouade offensive ultra-talentueuse composée de De Bruyne, Trossard, Lukaku, Doku, Bakayoko et Openda qui a de quoi exciter les papilles sur le papier, les Belges sont restés muets pour leur entrée dans le tournoi. Nous leur souhaitons de tout cœur bonne chance pour leur match face à la Roumanie, surprenant et facile vainqueur de l'Ukraine.

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