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vendredi 15 octobre 2010

Carlos Valderrama, le foot en marchant

Carlos Valderrama est avant tout connu pour l'improbable crinière qu'il a promenée des années durant sur tous les terrains du monde et qui lui vaut de figurer en bonne place au palmarès des phénomènes capillaires footballistiques, aux côtés de Chris Waddle, Jacek Ziober (qui se souvient de Jacek Ziober, coéquipier du Colombien à Montpellier?), Alexis Lalas ou Taribo West. Mais outre le fait que le moustachu colombien était un excellent technicien, il restera dans l'histoire du jeu comme un des joueurs les moins mobiles de tous les temps.


Il ne fallait pas lui causer pressing et football moderne, à l'ami Carlos. Son truc, c'était de rester tout le match dans le rond central (aux quarante mètres avec vent dans le dos) et de servir de plaque tournante à l'équipe en usant d'un minimum de touches de balle et avec la simplicité propre aux grands. A l'instar d'un Riquelme, Valderrama aurait pu jouer en fumant des clopes et pensait sans doute que la course était un outil dispensable dont se servent les sous-doués et les médiocres pour compenser leurs lacunes techniques.

Il était la preuve vivante qu'on peut très bien jouer superbement au football (et des deux pieds) sans fournir le moindre effort, quand tellement d'autres ont vainement accumulé les efforts pour ressembler à des joueurs corrects. Que les entraîneurs qui s'échignent à privilégier les marathoniens et les montagnes de muscles et les statisticiens du kilomètre d'une certaine chaîne cryptée se procurent quelques VHS du Colombien: sans doute moins de bornes parcourues en toute une carrière que Miralem Pjanic en une saison, mais 111 sélections (record national) pour un pays où les mauvaises performances sont punies non d'une mauvaise note dans la presse mais d'une balle dans la tête, deux titres de footballeur sud-américain de l'année en 1987 et 1993 et une statue à sa gloire coiffée d'une imposante perruque dans sa ville natale de Santa Marta. Le tout en gardant les chaussettes sur les chevilles et en trouvant toujours une excuse pour rater le footing à l'entraînement (un rendez-vous chez le coiffeur par exemple). Le prototype du joueur sud-américain comme on les aime.

L'hirsute phénomène débute sa carrière sous les couleurs de l'Union Magdalena puis de Milionarios, club au nom à la limite de l'indécence à Bogota, avant de rejoindre l'un des plus grands clubs du pays, le Deportivo Cali, en 1985, année où il honore également sa première sélection. Une brillante Copa America argentine en 1987 où sa sélection se classe troisième et dont il est élu meilleur joueur (devant Maradona, tout de même) et une remarquable performance individuelle à Wembley face à l'Angleterre au printemps suivant achèvent de séduire Loulou Nicollin qui le fait signer à Montpellier en 1988.

Le joueur, dont la toison fait le régal de la presse et des photographes de l'Hexagone, se voit remettre les clés d'une équipe dans laquelle évoluent entre 1988 et 1991 (les trois saisons que Valderrema passera au club) des joueurs tels que Laurent Blanc, Eric Cantona, Roger Milla ou Julio Cesar. Mais le Colombien déçoit souvent, à l'image d'un club à l'effectif brillant qui se traîne en fond de classement, et ne laisse pas un souvenir impérissable en France. Il tentera vainement sa chance en Espagne avec Valladolid avant de rentrer au pays (Independiente Medellin, Junior) et de terminer sa carrière en 2004 aux Etats-Unis.

Mis à part ses années sous le maillot du Deportivo, Valderrama n'a jamais véritablement brillé en club, et son passage en Europe fut bien terne. C'est surtout avec la sélection, qui avait fait du fameux toque (jeu basé sur la répétition des passes, la circulation du ballon et un minimum de touches de balle) sa marque de fabrique et, pensait-on, son arme fatale, que le meneur de jeu se sent le plus à l'aise et exprime le plus naturellement ses qualités. Mais la Colombie manque ses rendez-vous avec l'Histoire.

En huitièmes de finale du Mondiale italien, Milla pique la chique dans les pieds d'un Higuita parti à l'aventure et élimine les Cafeteros. Quatre ans plus tard aux Etats-Unis, la Colombie, emmenée par une bande de fous furieux en attaque (Rincon, Asprilla, Valencia), cale en poules après un parcours brillantissime en qualifications et un mémorable 5-0 passé à l'Argentine à Buenos Aires qui lui avait collé une trop lourde pancarte de favori dans le dos. Deux défaites face à la Roumanie et les Etats-Unis, et par ici la sortie. En France, Valderrama et cie ne font guère mieux: à nouveau battus par les Roumains, les Colombiens s'inclinent également face à l'Angleterre et terminent troisièmes de leur poule.

La Colombie ne s'est plus qualifiée pour une Coupe du Monde depuis 1998 et peine à sortir des joueurs de calibre international. Valderrama, qui fêtera ses cinquante piges l'an prochain, n'a pas d'équivalent dans le paysage footballistique actuel, où même les artistes doivent transpirer et faire leur part de boulot ingrat sous peine de tâter du banc de touche. Même Xavi, au four et au moulin à longueur de saisons, est aujourd'hui gagné par la lassitude et menacé d'épuisement. Si Valderrama ne défendait pas (ce qu'on ne lui demandait sans doute pas), il n'était pas individualiste pour autant, et certainement pas obsédé par le but. Son jeu était tourné vers les autres, basé sur une certaine science du tempo et de la juste orientation, le goût de l'offrande et un savant mélange entre amour de la chique et souci du geste utile. S'il a suivi le dernier Mondial, gageons que la victoire de la Roja n' a pas du totalement lui déplaire.





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