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jeudi 26 juin 2014

En attendant la suite

Il ne servirait strictement à rien de chercher à tirer de quelconques conclusions de ce match face à l'Equateur, si ce n'est celle qu'il permet à la France de terminer première de son groupe. Deschamps avait largement remanié son équipe, jeté le bleu des Bleus Schneiderlin dans le grand bain, mis au repos ses deux latéraux titulaires et confié le flanc droit de l'attaque à Sissoko (alors qu'honnêtement, on aurait préféré que Rémy débute le match). Il savait qu'un nul suffisait à s'assurer la pôle, et c'est tout à son honneur d'avoir tout fait tactiquement pour l'emporter en deuxième période, notamment en faisant entrer Giroud à la place de Matuidi, sans doute autant pour faire souffler son marathonien que forcer la décision. Ses choix faillirent payer mais ses hommes se sont simplement montrés trop maladroits devant le but.


La seule chose que l'on peut affirmer sans se mettre le doigt dans l’œil ou se mordre l'épaule, c'est que la France a besoin d'espaces pour développer son jeu, avant tout fondé sur une récupération haute et une projection rapide vers l'avant de la part des milieux de terrain qui ainsi créent le déséquilibre et le surnombre. 

Contre un adversaire qui défend bas et en bloc comme l'a fait l'Equateur, les Bleus, dont la patience dans la construction n'est pas vraiment le point fort, peinent à trouver la faille (ils ne sont d'ailleurs pas les seuls dans ce cas, les Argentins par exemple ayant connu exactement les mêmes difficultés). Ils devraient donc trouver dans la suite de la compétition des conditions favorables à la pleine expression de leur football, puisque leurs futurs adversaires ne se contenteront pas de bétonner autour de leur surface.


Ce troisième match n'est jamais facile à aborder lorsqu'on est déjà qualifié et en très bonne position pour la première place. Deschamps n'est pas tombé dans le piège de vouloir absolument donner du temps de jeu à tout le monde (il existe une différence entre sélectionneur et G.O. du Club Med, que ne saisissait pas très bien Raymond Domenech, grand adepte du jeu de la banane dans la bouteille lors de ses entraînements). 

En dosant ses retouches, et si l'on considère que certaines lui furent imposées par les circonstances (suspension de Cabaye, petit souci viral pour Varane), il a avant tout cherché à rester dans la continuité et préserver la fameuse «dynamique» avec laquelle on nous a rabattu les oreilles avant la rencontre. Une défaite aurait instillé le doute dans les esprits, et Deschamps ne dispose pas de deux équipes parfaitement égales et interchangeables.

Contre le Nigeria, un adversaire à prendre très au sérieux, il faudra gommer certaines imperfections et commencer par garder ses nerfs, Sakho et Giroud s'étant rendus coupables de gestes répréhensibles qui pourraient coûter cher lors d'un match à élimination directe. Il n'est pas normal non plus que les Bleus aient concédé autant d'occasions et de situations dangereuses en supériorité numérique. Peut-être est-ce dû à l'absence de Cabaye, le libero du milieu, qui sait toujours parfaitement compenser, anticiper les pertes de balle possibles, se replier si ses deux compères du milieu participent à l'attaque et ainsi tuer le danger dans l’œuf. Schneiderlin fut loin de démériter pour sa première sélection, mais il ne possède ni l'intelligence tactique du Parisien ni sa qualité dans le jeu long.


Ceux qui doutaient de la capacité de Messi à porter son équipe en sont pour leurs frais. Certes, le lutin barcelonais ne tient pas encore le trophée dans ses bras (et, à vrai dire, on voit mal comment cette Abiceleste fragile et intermittente pourrait aller au bout), mais il aurait difficilement pu se montrer plus décisif lors de ce premier tour: un pion superbe contre la Bosnie, un autre dans les arrêts de jeu contre l'Iran, deux buts face au Nigeria dont un coup franc somptueux dans la lunette d'un excellent Enyeama: merci bien, le bonjour chez vous et un petit coucou à Ronaldo au passage, qui va devoir faire autre choses que des frappes des trente mètres au-dessus contre le Ghana. Si jamais le Portugal se faisait sortir ce soir, monsieur grosses cuisses pourrait faire une croix sur le Ballon d'Or (en même temps, entre lui et Neymar, hein bon tout ça vous m'avez compris quoi).

Si tous les coéquipiers de Messi jouaient à leur niveau et arrêtaient de multiplier les erreurs techniques et les passes prévisibles, l'Argentine serait bien plus dangereuse et séduisante. Higuain et Agüero, pourtant tous deux auteurs d'une année pleine et habituellement efficaces sous le maillot bleu ciel et blanc, ont traversé le premier tour comme des fantômes, tandis que Gago semble avoir besoin de toucher le cuir au moins cinq fois avant d'envisager de le lâcher. 

Seul Di Maria, sur la lancée de sa saison de toute beauté avec le Real, parvient à faire des différences balle au pied, à accélérer le jeu et combiner habilement avec ses partenaires. La défense fait souvent peine à voir, à l'image d'un Fernandez en mode Lugano: lent, peu réactif, souvent mal placé, approximatif dans la relance, bref tout saut rassurant. Garay essaie tant bien que mal de tenir la baraque mais il a du boulot pour deux (comme disait Coluche « on avait du boulot pour quatre, heureusement on était huit »). 

 Paradoxe ultime: l'Argentine joue mieux collectivement avec Lavezzi et sans Agüero (je jure devant Nietzsche que la présente chronique a été rédigée sous la simple influence stimulante de cafés matinaux et sans l'usage de substances illicites, autrement dit on recommande le Lavazza pour écrire sur Lavezzi): le Parisien se montre souvent brouillon comme à son habitude, mais au moins donne-t-il un minimum de vitesse et de largeur au jeu, tandis que Higuain et Agüero se marchent trop souvent sur les crampons dans l'axe. Messi est capable de mettre le feu dans le bloc le plus compact, mais si les défenseurs doivent aussi verrouiller les flancs et garder un oeil sur l'avant-centre dans la surface, leur tâche devient extrêmement ardue. Il faut absolument que l'Argentine parvienne à multiplier les sources de danger et faire perdre leurs repères à ses futurs adversaires pour se montrer à la hauteur de ses ambitions.


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