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samedi 7 juin 2014

La vie sans Ribéry

Il ne faut ni chercher à minimiser l'importance du forfait de Ribéry ni sombrer dans le catastrophisme. Avec Benzema, le balafré était le seul véritable joueur de classe mondiale du groupe, c'est-à-dire un élément qui a déjà démontré sa capacité à faire la différence lors des grands rendez-vous et dont le nom inspire la crainte à l'adversaire. Tout comme le Madrilène, il a cependant essentiellement brillé en club, et force est de reconnaître, quitte à pour une fois hurler avec la meute, qu'il n'a jamais eu tout à fait le même rayonnement avec les Bleus que sous le maillot du Bayern.

Si la valeur de Ribéry reste incontestable, on ne peut guère dire que l'équipe de France a perdu sa pierre angulaire, son playmaker, l'homme de base de son système, et toute comparaison avec l'absence de Pirès et la blessure de Zidane en 2002 serait totalement inappropriée.



C'est d'abord le profil individuel du joueur qui permet de relativiser la portée de son forfait: Ribéry n'est ni Pirlo, ni Iniesta, ni Schweinsteiger, au sens où il ne porte pas le jeu de l'équipe sur ses épaules, ni un serial buteur comme Ronaldo ou Messi. De par ses caractéristiques naturelles et son placement sur le flanc gauche, il appartient à la catégorie des joueurs de rupture, capables d'accélérer et de créer des brèches dans le bloc adverse, de déborder et délivrer des centres de qualité, voire parfois de finir le boulot eux-mêmes. Il est certain que son coup de rein et sa faculté d'élimination manqueront aux Bleus mais, comme on a pu le voir contre l'Ukraine, la force de l'équipe se trouve plutôt dans l’entre-jeu et dans les pieds de ses trois milieux. Lors du barrage retour, Ribéry a mobilisé l'attention des défenseurs adverses et provoqué une expulsion, mais il fut loin d'être l'homme du match.


La France a déjà disputé deux matches de préparation sans son boute-en-train de service (pour le poil à gratter dans les plumards, la moutarde dans le café et les coussins péteurs sur le banc de touche, il faudra attendre l'Euro 2016) qui ont mis en évidence quelques solutions alternatives. S'il décide de maintenir son système en 4-3-2-1 avec deux joueurs excentrés et une pointe, il peut tout à fait aligner Rémy ou Griezmann, tous deux très en jambes semble-t-il, sur le côté gauche.

La rencontre face au Paraguay a révélé une complicité évidente entre Valbuena et Giroud, excellent dans un rôle de pivot-remiseur-tour de contrôle à l'opposé du registre de Benzema. Quid de Capella, qui remplace numériquement Ribéry? Outre le fait qu'avec l'apparition de l'un au profit de l'autre, le QI moyen du groupe reste constant, le Montpelliérain devra sans doute se contenter d'un temps de jeu réduit voire nul.


Le fait que Ribéry n'accompagne pas les troupes au Brésil va éviter à Deschamps un feuilleton médiatique autour du dos de son joueur semblable à celui consacré à la cuisse de Zizou il y a douze ans: bulletins de santé quotidiens, nouvelles contradictoires, doctes avis de spécialistes médicaux, etc. Pour le sélectionneur, les choses sont claires d'emblée et, à coup sûr, cela vaut mieux que le poids de l'incertitude. Pour combler l'absence de Ribéry, il faudra trouver des solutions collectives et que chaque joueur en fasse peut-être un peu plus qu'à l'habitude. 

Les Bleus ne peuvent compter sur une individualité en particulier et en attendre des merveilles, ce qui constitue peut-être plus un atout qu'un handicap et met une claque salutaire au mythe très français du sauveur. Chacun devra prendre ses responsabilités et élever son niveau de jeu à la hauteur des exigences d'une telle compétition. Cette dernière phrase ressemblant de façon très inquiétante à du Deschamps en conférence de presse, nous allons en rester là pour aujourd'hui et faire une cure à base de citations de Churchill.

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